Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/291

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groom, attendait à la tête des chevaux le moment de gravir, au départ, l’étroit siège de derrière.

Bientôt Ethelfleda, confuse de son retard, parut, pleine de hâte, ses gants encore pliés, tenant en main, par tendre attention conjugale, une rose-thé distraite d’un bouquet exempt de toute nuance voisine du rouge, dont son mari, le matin même, lui avait fait hommage.

Interrompant son élan, un certain Casimir, vieillard octogénaire portant la livrée de l’hôtel, la rattrapa pour lui présenter un pli.

Depuis soixante ans en service dans l’établissement, Casimir, maintenant gratifié d’une sinécure, ne s’occupait plus que du classement et de la remise des lettres.

L’enveloppe offerte par lui montrait, dans sa suscription noire, le mot pairesse tracé à l’encre rouge au-dessus du nom : Lady Alban Exley.

Mort un an avant un frère aîné célibataire, le père d’Alban — nommé Alban aussi — n’avait jamais été que lord de courtoisie étranger à la pairie. Aussi, pour distinguer les deux ladies Alban Exley, avait-on respectivement recours aux termes douairière et pairesse.