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Page:Roussin - Une campagne sur les côtes du Japon, 1866.djvu/90

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Les Japonais de toutes les classes se soumettent entre eux aux règles d’une excessive politesse ; c’est peut-être, sous ce rapport, le peuple le plus formaliste de la terre. — Lorsque deux Japonais s’abordent, que ce soient deux nobles ou deux portefaix, ce n’est qu’avec des saints multipliés et des compliments sans fin, dont la formule est déterminée par un code spécial. — Vis-à-vis des étrangers, cette politesse est froide et réservée de la part des classes supérieures, mais avenante et empressée chez le peuple : il n’ira jamais, cependant, jusqu’à leur témoigner les marques excessives de respect qu’il doit au moindre de ses yacounines. — Au

    Yokohama, peut entrer librement dans les établissements de bains, où hommes et femmes, qui en font un usage journalier, se baignent à la mauresque, accroupis sur un plancher légèrement incliné, où coule de l’eau chaude, et à peine séparés les uns des autres par une cloison de quelques pieds de haut. Ce détail, ainsi que quelques autres du même genre, peut paraître singulier à notre pudeur ; mais les Japonais, sur ce chapitre, ne s’astreignent pas aux règles en vigueur chez les peuples européens. Il ne faut pas en conclure à une plus grande immoralité du peuple Japonais, qui est bien loin, au contraire, de pratiquer les lices honteux si communs en Chine. La prostitution s’exerce au Japon sur une grande échelle, mais en dehors de la famille. Elle est placée sous l’administration directe de la police, et excessivement réglementée : des quartiers complétement isolés sont, dans toutes les villes, affectés aux femmes qui se livrent à ce genre de vie. Elles y ont généralement été envoyées dès leur plus tendre enfance, et la réprobation publique ne paraît pas s’attacher à leur métier. Elles peuvent parfois, au bout de quelques années, abandonner ce mode d’existence pour devenir des épouses fidèles et respectées.