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PARIS

Les sentiments les plus contraires se heurtent dans le cœur de Charlemagne. Ganelon et Roland ! Gérald et Berthe ! Il y a dans ces quatre noms un double et sombre problème qui le plonge dans une insondable perplexité !

Ganelon a livré Roland, mais son fils l’a vengé ! Gérald a Ganelon pour père ; mais la sœur de Charlemagne est sa mère, Roland est son frère, et il vient de sauver l’honneur de la France ! Que faire ? Que décider ?

Charlemagne réfléchit, hésite, et prie le ciel de l’éclairer. Enfin il juge que Gérald épousera Berthe, et que Ganelon s’en ira finir ses jours dans quelque solitude de la Palestine, et dira à son fils qu’il a fait ce vœu pendant qu’il combattait le Sarrazin et pour obtenir son triomphe.

Mais pendant la cérémonie des fiançailles voilà que le prisonnier saxon, qui a tout découvert, révèle le vrai nom du Comte Amaury devant toute la Cour. L’infortuné Gérald est anéanti sous ce coup qui le frappe, et croit que Dieu l’a maudit.

Cependant Charlemagne veut ranimer ses espérances : il convoque les grands de sa Cour, et leur demande conseil. Tous s’accordent à vouloir le mariage, et Berthe elle-même y consent.

Mais ici, la scène grandit et le génie du poète se révèle ; car c’est Gérald qui ne veut plus.

« Sire, je vous bénis dans mon âme confuse,
« Mais ce dernier bienfait, sire, je le refuse.