Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/138

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sa tribu, monté sur un cheval fringant, et portant à sa ceinture quelques chevelures des ennemis !

C’était une expédition de ce genre que rêvaient de faire les deux héros de ce récit, lorsque par suite d’un accident de terrain qu’ils n’avaient pas soupçonné, ils s’aperçurent tout à coup, côtoyant l’un vers l’autre, un ruisseau qui serpentait dans la plaine.

Ils firent halte, se mesurèrent des yeux et se mirent à réfléchir. Allaient-ils se battre ? Mais où serait la gloire de se battre ainsi sans témoins ? Et s’ils se blessaient tous deux mortellement, qui irait raconter aux frères leurs coups d’éclat et les péripéties de la lutte ?

De loin, ils se communiquèrent ces sentiments par signes, et déposant leurs armes dans l’herbe ils marchèrent l’un vers l’autre. Ils se saluèrent, s’assirent au bord du ruisseau, mangèrent et fumèrent ensemble, puis l’un d’eux proposa de jouer.

La passion du jeu est bien dans la nature, et elle est terrible chez les Sauvages. La proposition fut acceptée avec un cri de joie, et les deux joueurs, assis en face l’un de l’autre sur le tapis vert de la prairie, préparèrent le jeu qu’ils appellent jeu de mains.

L’espace de terrain qui les sépare est divisé en deux, et chacun y plante un nombre égal de bâtonnets représentant un nombre convenu de points. En même temps, la valeur des objets qu’ils vont jouer — car ils n’ont pas d’argent — est fixée par un nombre conventionnel de