Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/192

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mort promenait ses ravages, était effroyable. De tous côtés s’élevaient des gémissements et des plaintes ; les uns étendus sur l’herbe se tordaient dans les convulsions de l’agonie, les autres erraient comme des fantômes à la lueur des feux qui s’éteignaient, les chiens hurlaient comme si le mal les avait torturés eux-mêmes, et quand l’aurore se levait, les missionnaires faisaient le tour des tentes pour compter les morts et leur donner la sépulture.

Or pendant que le terrible fléau sévissait ainsi au bord de la Saskatchewan, la fille unique du grand sorcier Papabkinès (la Sauterelle), fut un jour atteinte par la maladie. Son père l’adorait, et quand il la vit dans les transes de la mort il perdit confiance dans ses jongleries et ses médecines, et il vint demander des prières aux missionnaires.

Le Père Lacombe alla voir la jeune fille, et il constata qu’elle était arrivée à la dernière période de la maladie, et qu’il n’y avait plus d’espoir. Il l’exhorta à la mort et lui administra les derniers sacrements ; car la jeune fille était chrétienne, quoique le père fût resté païen.

Le R. Père André qui partageait alors avec le Père Lacombe son pénible ministère, pendant cette effrayante épidémie, alla voir aussi la jeune fille, et avertit le chef Indien de faire son sacrifice.

Mais aussitôt que les missionnaires étaient de retour à leur tente, le malheureux père revenait les trouver et les suppliait de venir voir sa fille, espérant toujours que