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Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/193

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l’homme de la prière serait plus puissant que lui auprès du Grand Esprit.

« — Mais, mon pauvre ami, lui disait le Père Lacombe, il est absolument inutile que je retourne voir ta fille ; je vais prier pour elle ici. Il faut te résigner d’ailleurs, car ton enfant va mourir, et Dieu va la recevoir dans son paradis. Tu n’as pas voulu te faire chrétien, malgré que tu nous connaisses depuis longtemps, et tu continues de mêler tes superstitions païennes et tes jongleries à quelques-unes de nos croyances que tu as fini par accepter. Mais le bon Dieu n’est pas satisfait de cette conduite, et c’est pour te convertir sans doute qu’il t’inflige cette grande douleur. »

Le sorcier écoutait tout cela sans rien répondre, la tête basse, les yeux fixés vers la terre ; mais quand le missionnaire se taisait il relevait la tête et disait : « Viens voir ma fille encore une fois avant qu’elle ne meure. » Le Père Lacombe se laissa toucher. Tout accablé qu’il fût par les rudes labeurs de la journée, il marcha vers la loge du sorcier qui était à deux milles de distance. Il trouva la malade dans le paroxisme de la fièvre. Toutes les éruptions qu’il avait observées le matin étaient rentrées, et selon toutes les apparences la mort était inévitable et prochaine. Le prêtre lui adressa quelques paroles, récita des prières et s’en revint.