Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/221

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« De temps en temps, j’étais témoin du départ de quelques braves. Leurs jeunes femmes, ou leurs fiancées, ou leurs sœurs, les armaient, les équipaient, et ils partaient pour des expéditions lointaines, en poussant le cri de guerre, avec les encouragements des Vieillards, et les acclamations de la tribu.

« Quand j’eus dix-sept hivers je résolus de me faire un nom, et de partir aussi pour la guerre ; mais je ne communiquai mon projet à personne, car je n’avais ni sœur, ni fiancée, ni aucun homme qui s’intéressât à moi.

« Je me procurai un vieux fusil, et quelques provisions. Je me fabriquai moi-même un arc, un carquois plein de flèches, et un lasso ; et je partis à l’improviste, tout seul, au milieu de la nuit. Mon absence ne fut guère remarquée, parce que personne ne s’occupait de moi.

« Pendant cinq jours et cinq nuits, je cheminai dans la prairie, cherchant un camp ennemi, dormant quelques heures dans des cachettes comme une bête fauve.

« Un soir, je découvris au loin, au bord d’une rivière, un vaste camp de Pieds-Noirs. Je m’embusquai dans un ravin, au milieu des broussailles, et j’attendis l’aurore.

« Au point du jour, j’examinai les alentours et les mouvements du camp. Je remarquai un grand troupeau de chevaux qui s’en allaient paître dans la plaine.