Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/366

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colossal couronné d’un mirador et d’un toit conique, avec des frontons variés, des pignons aigus, une tour pentagone flanquée de tourelles-vedettes, un beffroi surmonté d’un clocheton, des croisées de toutes dimensions et de toutes formes, des créneaux, de faux mâchicoulis, des mansardes terminées par des flèches, toute une végétation de pierre, de brique et de cuivre surgissant du rocher qui domine le port !

J’en fus ravi. On a beau le décrier, Québec est la ville incomparable, et si j’étais étranger j’en raffolerais. Mais, étant Québecquois, je ne l’aime qu’avec mesure parce que je connais ses défauts. Je le lui dirai quelque jour, mais à lui tout seul, à l’oreille, afin que ses voisins n’entendent pas.

Malgré tout, Québec est encore la ville où l’on prend la vie par le meilleur côté. On n’y fait guère fortune ; on n’y déploie ni faste, ni luxe. Mais on y vit bien, tranquillement, gaiement, sagement. Même sur le chemin de la fortune on n’y court jamais ; on prend le temps de s’asseoir, de causer, et même de dormir. Les seules insomnies que les Québecquois se permettent sont généralement causées par des travaux intellectuels, ou par la politique. Oui, l’amour exagéré de la politique est un défaut québecquois ; j’avais promis de ne pas le dire au public mais l’aveu m’a échappé.