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Page:Roy - L'épluchette, contes joyeux des champs, 1916.djvu/87

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L’épluchette

Tout à coup, à mes pieds, un’ bourse bien garnie,
Si l’on pouvait en juger pas sa mine arrondie,
Arrête mes regards. Sans perdre un seul moment,
Elle est entre mes mains, et là, l’examinant
Je deviens ébahi : — « Cristi ! la belle aubaine ! »
La bourse contenait en argent la centaine
Et même un peu plus qu’ça. J’aurais pu su’ l’pavé
Battre un vif entrechat !… J’eus envi’ d’me sauver !…
Après l’premier moment d’exaltation qui vaille
J’examine assobri ce que vaut ma trouvaille,
Cent-dix piastres ! Ah ! Ce qu’on ne mentait pas
Quand on m’disait qu’à Montréal, à chaque pas,
On pouvait ramasser souvent une fortune !
Eh ben ! v’là qu’subit’ment il m’en arrivait une.
Je poursuis mon chemin le cœur tout réjoui.
Un tramway passe. Tiens ! si j’faisais un tour ? Oui,
C’est ça, promenons-nous ! J’fais arrêter la machine,
J’y monte et m’v’là parti su’ la ru’ Sainte-Catherine !
J’vous dis qu’ça roulait ben, ben mieux qu’mon vieux gris !
Le mesieu conducteur appelle : SAINT-DENIS !
Un m’sieu se lève et sort. Voilà que je raisonne :
« Tiens, m’sieu l’conducteur connaissait c’te personne,
N’ignorant pas, sans doute, ousqu’elle descendrait ? »
Un peu plus loin voilà qu’il nomme : SANGUINET !
En appelant ce nom, il visait un gros t’homme,
Assis tout auras moi, qui mâchait de la gomme ;
Et mon voisin de droite, aussitôt s’lève et sort.
Étonné, j’ouvre l’œil car ça devenait fort !
Est-ce que l’conducteur connaissait tout le monde
Ainsi qu’leur point d’arrêt ? Probable !… une seconde