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Page:Roze - Histoire de la Pomme de terre, 1898.djvu/157

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SON INTRODUCTION EN FRANCE 143

en font des espèces de beignets, etc. Cette racine, de quelque manière qu’on l’apprête, est fade et farineuse. Elle ne sauroit être comptée parmi les aliments agréables ; mais elle fournit un aliment abondant et assez salutaire aux hommes, qui ne demandent qu’à se sustenter. On reproche avec raison à la Pomme de terre d’être venteuse : mais qu’est-ce que des vents pour les organes vigoureux des paysans et des manœuvres ? »

L’auteur de l’article n’était évidemment pas de ceux qui, comme le disait Des Combles, aimaient passionnément la Pomme de terre. Toutefois, ce qu’il dit nous montre combien la classe aisée lui accordait peu d’estime. Après les exhortations adressées aux cultivateurs par Duhamel du Monceau, on serait peut-être conduit à se demander ce que l’on pouvait bien penser de la Pomme de terre dans les conseils du Roi Louis XV. Nous trouvons une réponse à cette question dans un très curieux document que nous devons à l’obligeance de M. le Dr Laboulbène, professeur à la Faculté de Médecine de Paris. Ce document est un extrait des délibérations en 1771 de cette Faculté, dont les procès-verbaux étaient rédigés alors en langue latine. Nous les traduisons in extenso, comme il suit.

« Le Dimanche, 2 mars 1771, il y eut convocation de tous les Docteurs médecins des Écoles supérieures, à 10 heures du matin, après la messe. Dans cette séance, lecture fut donnée de la Lettre suivante, adressée au Doyen de la Faculté par le très illustre Contrôleur général des finances[1] :

« à Paris, le 26 février 1771.

« Je vois, Monsieur, par une feuille hebdomadaire de Normandie, que je vous envoye, une lettre d’un auteur anonyme d’un sentiment bien opposé aux principes reçus jusqu’à ce jour sur l’usage des Pommes de terre ; je vous prie de me marquer si ces objections sont fondées et méritent quelque attention. Vous voudrez bien, à cet effet, en conférer avec ceux de Messieurs vos confrères que vous jugerez à propos de choisir et me faire part de leurs observations, de manière que s’ils ne pensent pas confor-


  1. — Cette lettre avait été reproduite d’après son texte même, en langue française, ainsi que le titre de la Feuille hebdomadaire de Normandie, dont il est plus loin question.