Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/324

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substances prennent leur accroissement. Libre, & jouissant de toute sa circulation, sa résistance est uniforme, les fibres animales & végétales s’étendent également de tous côtés. Qu’un arbre soit adossé contre une muraille, une colline, ou une élévation quelconque qui empêche l’air de jouir du même équilibre que de l’autre côté ; dès ce moment les branches étant inégalement comprimées, elles ne se développent point uniformément, les plus libres croissent aux dépens des autres, & l’arbre ne peut acquérir les justes proportions qu’il devoit avoir.

La transparence de l’air est une preuve de sa parfaite fluidité. Par lui-même, il ne tombe pas sous les sens ; la lumière est ce que l’on apperçoit d’abord dans l’espace, & son absence amène l’obscurité. Tous les objets sont sensibles & apparens dans ce milieu ; il est donc transparent, net ; mais est-il sans couleur ? Ce bleu, cet azur qui frappe nos yeux, appartient-il aux molécules aériennes, ou est-il le produit de la décomposition de la lumière & de son mélange avec l’ombre ? La question est assez facile à résoudre, si l’on fait attention qu’un corps coloré naturellement, quelque transparent qu’il soit, conserve toujours sa couleur ; elle peut augmenter ou diminuer d’intensité, mais jamais être détruite ; & tous les rayons lumineux qui la traversent en prennent la nuance plus ou moins. Ainsi à travers un verre coloré, tous les objets paroissent colorés ; mais il n’en est pas ainsi des objets que nous voyons à travers l’air. Cette couleur bleue que l’on apperçoit dans un tems serein, n’est pas due aux molécules de l’air, & ne teint pas réellement cet espace immense que nous appelons le Ciel. Les différentes réfractions que la lumière éprouve en parvenant à travers l’atmosphère jusqu’à nous, en sont les seules causes productrices ; & c’est dans la tunique qui tapisse le fond de notre œil, qu’il faut chercher le vrai siège de cette couleur. Tous les rayons colorés pris ensemble, produisent la lumière qui est blanche ; & s’ils n’éprouvoient, en traversant l’air, aucune séparation, ils produiroient dans notre œil, en l’affectant, la couleur blanche ; mais l’air opère une plus grande réfraction aux rayons bleus qu’aux autres, parce qu’ils en sont plus susceptibles : dès leur entrée dans la première & la plus haute région de l’air, cette réfraction est produite ; le rayon bleu s’éloigne de plus en plus, & cette séparation peu sensible au premier instant, augmente en proportion de la distance que ces rayons ont à parcourir ; de manière que le rayon bleu se trouve, pour ainsi dire, isolé en entrant dans l’œil, & il ne se rencontre aucune couleur assez vive pour effacer l’impression qu’il a produite sur le nerf optique. Mais si l’air est chargé de vapeurs & d’exhalaisons capables de détourner les rayons bleus, & de les empêcher de parvenir jusqu’à nous ; alors le bel azur disparoît des cieux avec la sérénité ; un ton de couleur grise se répand sur tous les objets. De là vient que dans les régions où l’air est sec & pur, le ciel brille d’un éclat plus vif ; il paroît plus élevé ; les bornes de la vue semblent se reculer, parce que les objets se