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dix pots d’eau chaude, où vous aurez fait fondre une livre de potasse, une livre de salpêtre, & une livre & demie de sel commun ; enfin, vous y verserez vingt-cinq pots de jus de fumier.

Lorsque la liqueur est froide, faites-y tremper les semences pendant vingt-quatre heures, si elles ont des enveloppes comme l’avoine, & quinze heures seulement si elles sont nues, de manière que l’eau surmonte les semences de deux pouces. Pendant ce tems-là, il faut les brasser cinq à six fois.

Si on veut semer au sortir du bain, on étend les semences sur le plat de la grange, & on les saupoudre de cendres de bois, en les remuant avec un râteau, jusqu’à ce que l’humidité soit absorbée, & que les grains soient séparés. Si quelque contre-tems oblige de différer cet ouvrage, on les laisse étendues sur le plat de la grange, en les remuant de tems en tems avec un râteau. On peut les conserver ainsi sans danger pendant deux ou trois jours, & même plus ; mais on évitera soigneusement de faire sécher ou essuyer ce grain au soleil.

On peut substituer au sel de soude, de la cendre de fougère ; & à la chaux vive, de la chaux éteinte & non desséchée, pourvu qu’on en mette une double dose, c’est-à-dire quatre livres. Si on n’a pas de cendre de fougère, on la suppléera par une autre cendre, en augmentant la dose, Celle de sarment sera très-bonne, & la plus mauvaise sera celle que fourniront les bois blancs, comme le saule, le peuplier, &c.

On peut faire servir cette liqueur pour un second bain & pour arroser tout terrain qu’on veut fertiliser. Cette liqueur est déjà en état savonneux, mais surchargée de principes alcalis : elle est, par conséquent, dans le cas de porter une nourriture directe & toute préparée aux plantes, & elle n’exige plus que d’être élaborée par leurs filtres & par leurs conduits.

Après avoir donné au terrain une première façon, dès que la dernière récolte a été enlevée en automne, & l’avoir labouré & hersé au premier printems, on sème cette avoine ainsi préparée, & ensuite une bonne quantité de poussière de grange, en choisissant un tems calme.

D’après cette méthode, on a vu plus d’une fois de très-abondantes récoltes. Dès l’automne, l’herbe forme le plus beau tapis qu’il ne faut ni faucher ni faire pâturer. Le succès de la récolte sera complet, si l’on peut se procurer de l’avoine de Hongrie, & l’on n’en devroit jamais semer d’autre. Elle donne plus de grains ; le grain est plus gros, plus farineux, plus pesant. Elle n’est point sujette à s’égrener sur pied ; on peut la serrer aussitôt qu’elle est coupée.

S’il y paroît de grandes & mauvaises herbes, comme des bardanes ou glouteron, des jusquiames, des chardons roland, des chardons étoilés, &c. (voyez ces mots) il faut sévèrement les arracher : dès l’année suivante on y recueillera deux coupes de foin ; & à la troisième, & non auparavant, on pourra, si l’on y est obligé, envoyer le bétail sur le regain d’automne, mais avec modération.

On comprend aisément que si le