Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/707

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canes perpétuelles, & des pertes irréparables pour le foible, à qui on enlève son héritage avec tout l’appareil de la justice & de la loi ; désordre affreux que rien ne peut excuser ni prévenir, parce qu’il est fondé d’un côté sur l’ignorance, & de l’autre sur l’abus du pouvoir remis entre des mains perverses & infidèles.

Les curés, les grands propriétaires, les gros fermiers ayant reçu en général une éducation plus relevée, ayant souvent passé une partie de leur jeunesse dans des colléges, sont plus à même de profiter des élémens d’arpentage que nous nous croyons obligés de donner ici. Ils sont les pères & les protecteurs des simples paysans qui les entourent ; c’est donc à eux à les éclairer & à veiller sur leurs intérêts, & surtout à tâcher de prévenir toutes disputes, toute altercation, tous moyens de procès, fléau terrible, qui fait plus de ravage dans la fortune du paysan, que la grêle & les épizooties : une récolte plus abondante, de nouveaux troupeaux bien soignés réparent les pertes que des accidens occasionnent, & rien ne rétablit le désordre, la ruine totale où jette un procès intenté à faux, mal commencé, mal conduit, & plus mal défendu. Non-seulement la science de l’arpentage est une science nécessaire aux grands colons, aux curés, aux seigneurs de paroisses, mais dans bien des cas elle devient un objet d’agrément & de délassement, dont les moyens sont honnêtes, & la fin toujours utile. L’arpentage a un ressort plus étendu que l’on ne croit communément ; tout ce qui tient à l’art de mesurer, diviser & calculer une superficie quelconque, est digne de ses regards ; il donne des principes sûrs, trace des procédés exacts, & s’appuie sur des démonstrations invariables. Ainsi en s’y livrant on ne craint point de se reprocher un jour d’avoir perdu du tems à une étude vaine, futile & oiseuse, comme tant d’autres, auxquelles nous ne sacrifions malheureusement que trop d’instans dans la vie.

L’arpentage, né de la nécessité & de la chicane, a pour but de fixer & de limiter une étendue de terrain, d’en connoître la superficie, & d’en tracer en petit les dimensions. On peut donc réduire à trois parties différentes entr’elles, mais ne faisant qu’un tout, un ensemble, toutes les opérations de cet art. La première consiste à prendre les mesures d’un terrain, & y faire toutes les observations nécessaires, à l’aide de certains instrumens, comme piquets, chaînes, cordes, perches, toises, graphomètre, planchette, alidade, &c. C’est à proprement parler, l’arpentage. La seconde partie enseigne l’art de tracer sur le papier, & de réduire en petit toutes les mesures & les observations faites sur le terrain même, ou d’en faire le plan, ce qui s’opère par le moyen du rapporteur & de l’échelle de l’arpenteur. Enfin, la troisième partie s’occupe à trouver l’aire du terrain mesuré, c’est-à-dire sa contenance en perches, toises, pieds, &c. ; ici le calcul seul agit & donne des résultats pour tous les cas possibles.

On sent facilement qu’avant d’en venir là il faut nécessairement posséder l’arithmétique, & au moins