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sante. 2o. Pourquoi entreront-elles dans la baguette par la tige unique, plutôt que par les deux branches ? 3o. Pourquoi entrant & affaissant par leur poids la tige unique & horizontale, la détermine-t-elle à tourner tantôt en dehors des mains par un quart de conversion, tantôt en dedans du côté de la poitrine de celui qui la tient, en décrivant les trois quarts d’un cercle ? car tantôt la baguette tourne en dedans & tantôt en dehors (suivant la volonté du jongleur, comme nous l’avons démontré plus haut). 4o. Enfin, quelle est la cause qui peut déterminer les vapeurs qui avoient pénétré la baguette, à en ressortir subitement, puisque le moment d’après elle peut reprendre sa situation horizontale & servir aux mêmes épreuves ? À ces questions joignons des faits. Les expériences que MM. Duhamel & Buffon ont faites sur le desséchement & l’imbibition du bois, nous apprennent qu’il faut un certain espace de tems pour qu’un morceau de bois plongé dans l’eau, s’imbibe au point d’acquérir une augmentation de poids ; qu’il faut non-seulement des jours, mais encore des mois pour qu’il reprenne la pesanteur qu’il avoit avant son desséchement, (Voyez Dessèchement & Imbibition) Comment concevra-t-on après cela qu’une baguette qui passe, sans s’arrêter, à travers une masse de vapeurs, si tenues la plupart du tems qu’elles sont invisibles, puisse s’en charger au point d’en augmenter de poids ? De plus la transpiration de la personne qui tient la baguette, forme autour d’elle une atmosphère de vapeurs qui doit agir nécessairement sur la baguette. Cette émission de corpuscules abondans, grossiers, sortis des mains & du corps, & poussés rapidement, doit rompre, écarter le volume ou la colonne de vapeurs qui s’élèvent de la source, ou tellement boucher les pores & les fibres de la baguette, qu’elle sera inaccessible aux vapeurs. Sans les vapeurs, nous dit-on, la baguette sera muette ; or comme elle n’agit que dans les mains, & qu’elle n’a pas la vertu d’empêcher la transpiration, elle devroit perpétuellement garder le silence sans l’adresse de celui qui la fait parler.

Je n’ajouterai pas que dans l’hypothèse de M. Formey, comme le jeu de la baguette ne dépend que des vapeurs, elle devroit se mouvoir dans les mains de tout le monde, ce qui n’arrive cependant pas ; mais ce qui pourra arriver indépendamment des vapeurs, lorsqu’on suivra exactement les procédés que nous avons indiqués.

L’effet sur la baguette des exhalaisons métalliques, soit que les matières qui les produisent soient en grande quantité, ou que ce ne soit qu’une simple pièce de métal ; celui des corpuscules d’un meurtrier ou d’un voleur, après plusieurs jours, non-seulement sur terre, mais encore sur une rivière rapide, ou sur une mer agitée, comme dans l’histoire de Jacques Aimar, est si ridicule & si impossible, que nous croirions mériter le même reproche que nous faisons à ceux qui le croyent, si nous perdions du tems à le réfuter. Si une meute suit une bête fauve à la piste, c’est que les corpuscules émanés du corps de l’animal existent encore sur les traces qu’il a suivies ; mais comment s’imaginer qu’un ou deux mois après, les corpuscules émanés du corps d’un assassin qui