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§ II. Degrés de chaleur que l’animal peut supporter, & effets du sommeil sur cette chaleur.

Plus les animaux sont parfaits, plus aussi sont-ils doués de la faculté de conserver ce certain degré de chaleur que l’on doit regarder comme la base de la chaleur animale. Cependant, d’après les expériences de M. Hunter, plusieurs de ces animaux & peut-être tous, ne conservent pas constamment ce même degré ; mais cette chaleur peut varier & s’écarter un peu de son point fixe, soit par contact extérieur, soit par maladie ; mais ces variations sont toujours plus grandes au-dessus du terme fixe qu’au dessous, c’est-à-dire, que les animaux parfaits résistent plus facilement à la chaleur qu’au froid, comme on le peut voir par l’exemple cité plus haut, & par celui d’une jeune fille dont parle M. Tillet, (Académie des Sciences, 1764, page 186) qui resta devant lui pendant près de dix minutes dans un four à pain, dont la chaleur étoit de cent douze degrés, c’est-à-dire, de vingt-sept plus forte que l’eau bouillante. La chaleur actuelle ou naturelle, se trouve augmentée & diminuée par le contact de l’air extérieur, & elle varie suivant les forces vitales, tant dans les mêmes parties, que dans les parties différentes du même animal. L’animal sain est plus en état de fournir à cette augmentation que l’animal malade, & toutes les parties ne sont pas également propres à la produire : plus les parties sont nobles, pour ainsi dire, & vitales, plus elles ont la force d’engendrer la chaleur. Il en est de même des parties les plus éloignées du centre ou du cœur. Dans la belle suite d’expériences de M. Hunter, sur la chaleur des animaux, (Journal de Physique, 1781) on y remarque un fait assez singulier : c’est que les oiseaux sont doués d’une chaleur de quelques degrés plus grande que celle de la classe des quadrupèdes, (quoiqu’ils soient certainement moins parfaits que ceux-ci). Quel a été le but de la nature en la leur prodigant ? ne seroit-elle pas destinée pour l’œuvre de l’incubation ? L’œuf, comme matière inanimée, n’a que la température de l’atmosphère ; il a besoin d’un degré bien supérieur pour éclore.

Le sommeil, dans les animaux comme dans l’homme, diminue la chaleur extérieure ; & un homme qui dort a toujours un degré & demi ou deux degrés de chaleur moindre que lorsqu’il veille. Plusieurs expériences faites par le docteur Martine sur cet objet, ont appris que le sommeil, tant qu’il dure, rafraîchit le corps à l’extérieur, mais que la chaleur se rétablit dès qu’on s’éveille. Quant à l’intérieur, il paroît qu’il n’éprouve pas de changement sensible ; enfin, plusieurs observations que l’on a faites sur des enfans, induisent à croire que la chaleur se retire dans l’intérieur tandis que l’on dort, & qu’elle revient au-dehors lorsqu’on se réveille.

Il faut bien distinguer le sommeil paisible & le sommeil inquiet : celui-ci tient le milieu entre le premier sommeil & la veille, témoins les rêves. Jugeons-en par les enfans qui s’abandonnant totalement à la nature, en sont les organes simples & fidèles. Quand ils ont mal dormi, leurs joues sont rouges, ils s’éveillent en sursaut, ils crient ; leur chaleur est augmentée. Au contraire, leur repos a-t-il été