Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/143

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s’en servir pour exploiter indifféremment toutes sortes de terreins : il n’est guère possible de les employer que dans les terres sablonneuses ; par-tout ailleurs ils ne feroient qu’effleurer la superficie de la terre : nous n’avons pas cette bonne espèce qui laboure une partie des terres de la Calabre & de la Sicile, & qui rend les mêmes services à l’agriculture, que peuvent rendre les mulets d’une taille moyenne que nous employons au labourage. Nous ne pouvons donc point les compter parmi les animaux dont nous avons le choix pour l’attelage des charrues.

Un attelage de bœufs est plus avantageux pour un agriculteur, qu’un attelage de chevaux ou de mulets. 1o. Les bœufs ne sont point aussi sujets à être malades que les chevaux & les mulets, qu’une journée un peu forcée peut mettre hors de service pour le lendemain ; 2o. leur entretien est moins onéreux au laboureur, qui ne les nourrit la plupart du temps qu’avec la mêlée faite avec de la paille & du foin, encore souvent n’est-ce que le second, dans les pays où l’on fauche les prairies plusieurs fois : rarement il est nourri avec du foin sans être mêlé, à moins que ce ne soit dans des temps où il a beaucoup de peine. Les chevaux & les mulets ne se trouveroient pas bien d’une nourriture aussi simple ; outre qu’ils veulent du bon fourrage, de temps en temps il faut leur donner de l’avoine ou de l’orge ; 3o. quand le bœuf n’est plus en état de servir, on peut l’engraisser dans une ferme, & le vendre ensuite presque pour le même prix qu’on l’a acheté : le cheval & le mulet, au contraire, dès qu’ils sont incapables de nous rendre service, on ne peut plus en tirer aucun parti. Les fermiers qui entendent bien leurs intérêts à cet égard, ont soin de changer leurs attelages en chevaux ou en mulets, tous les trois ou quatre ans, afin de prévenir la perte entière du prix qu’ils auroient coûté, s’ils les gardoient tant qu’ils peuvent encore servir au labourage.

La manière d’atteler les bêtes de tirage à la charrue, n’est point la même par-tout ; on se règle à cet égard sur la pratique locale, sans considérer si elle est bonne ou mauvaise. Dans certains pays on attèle les chevaux, les mulets, à la file les uns des autres ; dans d’autres on les attèle deux à deux : quand on n’a que trois bêtes de tirage, si elles ne sont point à la file, on en met deux de front, la troisième est en flèche devant les deux autres qui sont au timon.

Assez communément les bœufs sont attelés deux à deux, parce qu’on les fait tirer par la tête ; alors l’âge repose sur le joug qui est attaché à leurs cornes au-dessus de leur tête. Dans quelques endroits on les fait tirer l’un devant l’autre ; le joug étant alors inutile, on passe un collier à leur col auquel on attache les traits du timon ou du palonnier. Quoiqu’on les fasse tirer deux à deux, on ne les met pas toujours pour cela sous le joug : en Italie, on les fait presque tous tirer à la manière des chevaux, c’est-à-dire, par les épaules de devant, en leur mettant un collier pour attacher les traits.

Dans la manière d’atteler les bêtes de tirage aux charrues, il faut les