Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/23

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c’est-à-dire, l’enveloppe du grain. Une larve est toujours seule dans un grain de blé ; c’est dans cette loge qu’elle prend son accroissement aux dépens de la farine dont elle se nourrit : à mesure qu’elle mange, elle agrandit son logement, afin qu’il soit assez spacieux pour la contenir sous la forme de chrysalide.

Lorsque la larve a mangé toute la farine, & qu’elle est parvenue à sa grosseur, elle reste dans l’enveloppe du grain, où elle se métamorphose en chrysalide, d’un blanc clair & transparent. On distingue sous son enveloppe, la trompe, les antennes qui sont ramenées en avant, & les six pattes. Dans cet état le charançon ne prend point de nourriture ; il ne donne aucun signe de vie, que par la partie inférieure de la chrysalide, capable de quelques mouvemens quand on l’agite. Huit ou dix jours après cette première métamorphose, l’insecte rompt l’enveloppe qui le tenoit emmailloté, il perce la peau du grain, pour se pratiquer une ouverture afin de sortir de sa prison : le charançon paroît alors sous la forme de scarabée, qui est sa dernière métamorphose. Ce qui servoit de nourriture à la plupart des insectes, dans leur état de larve ou de chenille, ne leur convient plus dans celui de papillon ou de mouche : il n’en est pas ainsi du charançon : comme larve il vit de la substance farineuse du grain, & comme scarabée, elle est encore l’aliment qui lui convient. À peine est-il sorti de son état de chrysalide, qu’il perce l’enveloppe des grains pour s’y loger de nouveau & se nourrir de leur farine.

Quelques Naturalistes ont prétendu que le charançon, dans son état d’insecte parfait, ne se nourrissoit de la farine du blé, que quand il ne trouvoit pas mieux ; que s’il paroissoit rechercher les tas de blé, c’étoit pour y déposer ses œufs. Cependant c’est un fait dont il est facile de se convaincre, que le charançon se loge dans le grain pour en manger la farine. Qu’on visite des monceaux de blé ou de légumes attaqués par les charançons, on trouvera l’insecte logé dans l’intérieur du grain qu’il ronge pour vivre : sa couleur noire n’annoncera point que le charançon sort seulement de son enveloppe de chrysalide, puisqu’il est couleur de paille dès qu’il vient de quitter son fourreau.

ARTICLE II.

Des différentes espèces de Charançons.

Le genre des charançons renferme un très-grand nombre d’espèces, qui sont toutes remarquables par des différences caractéristiques. Pour ne pas les confondre, M. Geoffroy les a distribuées en deux classes ou familles. La première comprend les charançons à cuisses simples ou unies ; la seconde ceux qui ont les cuisses dentelées. Ce genre est si fécond en espèces, que M. Geoffroy en a distingué trente-trois dans la première famille, & vingt dans la seconde. Toutes ces espèces ne sont point également nuisibles à nos récoltes ; il n’y a que celle qui attaque les grains, que nous ayions sujet de redouter. Il y a des larves de charançons qui sont logées dans les féves, les pois, les lentilles, & autres légumes de cette sorte. Elles restent dans ces grains, de même que celles qui attaquent le blé, jusqu’à leur