Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/25

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échauffé, ou des grains germés par l’humidité, engendroient des charançons. Quelques naturalistes qui, sans doute, s’étoient peu appliqués à observer cette espèce d’insecte, ont assuré que le charançon pondoit ses œufs sur les épis, lorsque le grain étoit encore en lait, & qu’il étoit transporté avec le blé dans les greniers. Des observations plus exactes, sur l’économie animale des charançons, ont détruit toutes ces erreurs que l’ignorance avoit accréditées.

Le charançon n’est pas plutôt sorti de son enveloppe de chrysalide, qu’il est en état de s’accoupler, comme la plupart des insectes, pour reproduire son espèce. Son accouplement est toujours relatif à un certain degré de chaleur : quand elle va au dixième ou douzième, elle suffit pour donner aux charançons l’activité nécessaire pour cet acte réproductif des individus de leur espèce : quand la chaleur est au-dessous de huit ou neuf degrés, ces insectes n’ont pas assez de vigueur pour chercher à s’accoupler ; ils vivent dans un état de repos & même d’engourdissement : s’il fait froid, ils sont alors incapables de nuire, parce qu’ils ne peuvent prendre aucune nourriture. On peut donc assigner le commencement de leur accouplement, au retour du printemps, sur-tout dans les pays où cette saison est assez favorable pour que la chaleur aille au dixième degré. Tant qu’il fait chaud, ces insectes s’accouplent très-souvent ; ils restent unis long-temps dans cet acte, on peut les balayer, les transporter sans qu’ils se désunissent. La femelle fait par conséquent sa ponte dans tous les mois où la chaleur est à un degré convenable : dès qu’il commence à faire froid le matin, elle cesse de pondre. Depuis le moment de l’accouplement, jusqu’à celui où l’insecte paroît sous la forme de charançon, il s’écoule environ quarante ou quarante-cinq jours : on voit par-là qu’il y a, dans une année, plusieurs générations de ces insectes, qui multiplient encore davantage dans les pays fort chauds.

Dès que la femelle du charançon a été fécondée, elle s’enfonce dans les tas de blé, pour y déposer ses œufs : pour qu’ils soient en sûreté, elle fait à un grain de blé, un trou qu’elle dirige obliquement, dans lequel elle place un œuf ; elle n’en met jamais qu’un à chaque grain. Cet œuf ne tarde pas à éclore : au bout de quelques jours, il en sort une petite larve qui se loge dans l’intérieur du grain, pour y prendre son accroissement en rongeant la substance farineuse.

ARTICLE IV.

Manière de vivre des charançons.

C’est dans les tas de blé qu’on trouve ordinairement les charançons, à quelques pouces de profondeur, & non pas à la surface, à moins qu’on ne les ait troublé dans leur retraite, & qu’ils cherchent à s’enfuir : c’est-là qu’ils vivent, qu’ils s’accouplent assez communément, & que les femelles font leur ponte. En observant un monceau de blé, on ne peut guère connoître, en voyant les grains, quels sont ceux qui sont attaqués par ces insectes, parce qu’ils rongent toujours au milieu du grain en épargnant l’enveloppe ; de sorte que les grains dans lesquels ils sont logés, ont la même forme, la même