Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/27

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dès qu’ils sont au grand jour, ils fuient pour se cacher : si on en met sous des verres, ils courent de tous côtés pour s’échapper ; quand on y a mis quelques poignées de grains, ils cherchent tout de suite à s’y enfoncer. Quand on remue les monceaux de blé où ils se sont retirés, ils les abandonnent pour chercher une retraite dans les fentes des murs, dans les gerçures des bois où ils ne soient point inquiétés. Ils craignent encore plus le froid que la lumière ; pendant tout l’hiver, ils sont engourdis, ils ne prennent aucune nourriture. Souvent ils périssent en grande partie lorsque cette saison est très-rigoureuse.

ARTICLE V.

Moyens employés pour détruire les charançons.

Tous les procédés qu’on a annoncés pour détruire les charançons, ont eu jusqu’à présent si peu de succès, qu’on ne doit point craindre de faire tort à ceux qui les ont inventés, en avouant que ce sont des recettes inutiles. La plupart de ces moyens, qu’on trouve consignés dans les Journaux d’agriculture, consistent dans des fumigations & décoctions composées d’herbes d’une odeur forte & désagréable. Le résultat de tous ces procédés a été de communiquer au blé une odeur fétide & dégoûtante, sans nuire aux charançons, qui, enfoncés dans les tas de grains, ne pouvoient point en être incommodés. M. Duhamel a fait une expérience qui prouve évidemment que toutes les odeurs qui nous paroissent si désagréables, ne nuisent point aux charançons de façon à les faire périr. Il renferma du blé où ces insectes s’étoient établis, dans une caisse vernissée d’huile essentielle de térébenthine, sans qu’ils en aient souffert. Quand même toutes les odeurs si vantées seroient capables de leur nuire, il est difficile qu’elles parviennent jusqu’à eux, quand ils sont enfoncés dans un monceau de blé : ceux qui se trouveroient à la surface, s’enfonceroient tout de suite, ou abandonneroient le grenier pour revenir quand la mauvaise odeur seroit dissipée. La fumée de soufre, si active pour rompre l’élasticité de l’air, est sans succès pour suffoquer & faire mourir les charançons, qui n’ont pas besoin, pour respirer, d’une aussi grande quantité d’air que les grands animaux. D’ailleurs, cet insecte est attentif à éviter les dangers qui menacent sa vie ; il s’enfonce dans les tas de blé, au moindre signe du péril qui le menace ; c’est-là qu’à l’abri des moyens que nous employons pour le détruire, il brave nos efforts qu’il rend inutiles. Toutes ces fumigations sont encore plus infructueuses pour détruire les larves de ces insectes ; ce sont elles qui font les plus grands dégâts : calfeutrées dans le grain dont elles rongent la substance farineuse, les odeurs ni la fumée n’arrivent jamais jusqu’à elles.

Quelques économistes ont pensé que pour garantir le blé des charançons, il suffisoit de le mettre dans des caves boisées, ou de le cribler en hiver. 1o. En mettant le blé dans des caves, il seroit difficile de le préserver de l’humidité qui le feroit germer & pourrir. 2o. Les charançons se trouveroient très-bien d’une habitation paisible & obscure, ils feroient