Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/31

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

simple qu’il est peu dispendieux, mérite l’attention de ceux qui s’intéressent à la conservation des grains. Il peut être exécuté en grand, comme en petit, sans occasionner une dépense considérable, qui est souvent la cause que les projets restent sans exécution, parce qu’on est effrayé des frais qu’ils nécessitent. M. D. L. L.

Je crois devoir ajouter quelques observations au travail de M. D. L. L. Le charançon, cet animal si redoutable pour les grains, est connu dans nos provinces sous des noms différens ; ici on l’appelle cadelle, là calandre, ailleurs la chatte peleuse, cosson, cossan, gond, &c. Je ne crois pas que cadelle soit synonyme avec charançon, du moins ce qu’on nomme cadelle dans le bas Languedoc, ne me paroît avoir aucun rapport avec lui. Le charançon, dans son état de ver, ne sort pas de l’intérieur du grain où il est né, & dans lequel son œuf a été déposé ; la cadelle, au contraire, dans son état de ver, est souvent plus grosse que le grain même, & du double plus, lorsque le ver a acquis sa grosseur. Le charançon travaille comme un mineur dans l’intérieur du grain ; la cadelle, au contraire, attaque l’écorce par un des bouts & pénètre dans la cavité du grain, où elle ne sauroit & ne pourroit se loger. J’ai fait dessiner cet insecte dans son état de ver, j’en conserve un grand nombre pour attendre leur métamorphose en insecte parfait, & je représenterai l’un & l’autre à la gravure du mot Insecte.

Le lecteur verra sans doute avec plaisir comment s’exécute la multiplication prodigieuse du charançon ; on doit ces détails & ces observations à M. Joyeuse. Suivant la saison & le pays, la ponte commence plutôt ou plus tard ainsi qu’il a été dit. Le mois d’Avril sert d’époque pour nos provinces méridionales, & elle s’y propage souvent jusqu’à la fin d’Août : ainsi le dégât dans les grains est beaucoup plus affreux dans ces provinces que dans celles du nord.

La femelle dépose & cache ses œufs immédiatement sous la peau des grains. Pour cela elle y fait une piqûre qui la tient un peu soulevée en cet endroit, & y forme une petite élévation peu sensible à la vérité. Ces trous ne sont pas perpendiculaires à la surface des grains, mais obliques ou mêmes parallèles, & bouchés d’une espèce de gluten de la couleur du blé. Il paroît, d’après l’observation de M. Le Fuel, que ces insectes commencent à enfoncer, entre la peau & la substance du grain, le petit dard caché sous la partie inférieure de la trompe, 1o. parce que l’orifice du trou est visiblement plus droit que ne seroit celui d’un pareil trou fait avec la trompe, plus grosse que le trou ; 2o. parce que l’extrémité de la trompe est mousse & arrondie.

Il résulte de la table donnée par M. Joyeuse, qu’une seule paire pond un œuf par jour pendant tout le temps des chaleurs ; que dans 546 journées de multiplication de différentes paires de charançons, il y en a eu 282 d’engendrés, ce qui revient au même que si une seule paire, dans ce même temps, avoit produit ce nombre. La ponte cesse lorsque la chaleur du matin est au huitième degré, & les œufs pondus en Mai & Juin restent moins à éclore que ceux pondus dans les mois suivans.

Des charançons sortis au milieu de