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indissoluble, qui est le résineux. Mettez du rocou, du pastel, de l’indigo dans de l’esprit de vin, & vous en extrairez bientôt la teinture orangée du rocou, & bleue du pastel & de l’indigo. En général, toutes les parties vertes des végétaux ne sont solubles que dans l’esprit de vin, excepté la partie verte des épinards, qui l’est aussi dans l’eau ; enfin, quelques-unes, comme l’orcanète, ne se dissolvent que dans l’huile, ou la racine rouge d’une espèce de buglose.

Sans avoir recours aux opérations chymiques, veut-on distinguer, à l’œil nu, la matière colorante d’un très-grand nombre de plantes, surtout dans les parties les plus colorées, il suffit d’enlever adroitement l’écorce d’une feuille ou d’une corolle de fleur ; vous appercevrez le tissu réticulaire dans les mailles duquel est retenu le parenchyme coloré.

Dans cette expérience, on remarque quatre choses : 1°. l’écorce composée de l’épiderme qui par lui-même n’est point coloré, & qui est très-transparent ; (voyez Épiderme) il fait, dans ces parties, le même effet que l’épiderme de la peau d’un nègre ; la couleur noire ou cuivreuse d’un nègre ne réside pas dans l’épiderme, mais seulement au-dessous dans une substance muqueuse, gélatineuse, nommée le réseau de Malpighi ; 2°. l’écorce, proprement dite, que M, Desaussure nomme le réseau cortical, qui renferme les glandes corticales ; 3°, le réseau ou le tissu réticulaire, dont le filet des mailles, plus dur & plus ferme que que le reste, est de la même nature que les fibres ligneuses dont il ne paroît être que la prolongation ; 4°. enfin, une espèce de substance spongieuse englobée dans les mailles, & qui est proprement le parenchyme : c’est ce parenchyme qui contient & fournit la matière colorante.

Nous avons déjà observé que l’épiderme d’une feuille ou d’un pétale ressembloit à l’épiderme d’un nègre ; pareillement le parenchyme végétal ressemble au parenchyme animal, ou à cette substance gélatineuse qui forme le réseau de Malpighi, & qui est noire dans les nègres, blanche dans les habitans de la zone tempérée, brunâtre dans les individus basanés, marquetée dans les taches rougeâtres de la peau.

Quoique nous ayons dit que l’épiderme fût transparent, & que par conséquent ce n’est pas sa couleur que l’on apperçoit, mais seulement celle du parenchyme qui en est recouvert, cependant il influe dans la couleur, par rapport à son intensité. Si vous enlevez cet épiderme sur une feuille verte, le parenchyme paroît d’un vert un peu différent de celui qu’avoit la feuille auparavant ; & cette couleur revient dès que vous recouvrez le parenchyme de l’épiderme ; cette différence est sur-tout frappante dans les feuilles du pastel, dans celles du pavot, du souci, du rosier. On l’observe encore dans les pétales, avec cette distinction que l’épiderme reste presque toujours adhérent avec le parenchyme, & qu’alors il paroît lui-même coloré ; mais avec un peu d’attention il est facile de l’en détacher : les pétales de rose, sur-tout, offrent cette observation, ainsi que celles du géranium & du souci.