Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/623

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VII. Les premiers se sont hâtés, sans s’en douter, de produire la combinaison savonneuse, d’actionner la terre végétale ou humus, de l’approprier & de la faire consommer par es plantes qui ont végété sur cette terre si divisée ; mais comme cette terre végétale a été absorbée, & que les labours multipliés n’étoient pas capables de la renouveler, ils ont appauvri leur sol.

VIII. Les seconds, au contraire, ont trop multiplié les substances animales, & il ne s’est pas trouvé dans la terre, & tout à la fois, une quantité suffisante de sels pour les réduire à l’état savonneux. Si cette multiplicité d’engrais, auparavant accumulés en un tas, avoit été unie par exemple avec la chaux, la marne &c., pendant le temps de sa fermentation, alors la combinaison auroit déjà été faite en grande partie, & il n’auroit plus fallu, lors de leur mélange avec la terre, que son humidité ou quelque pluie pour les dissoudre, puisqu’ils étoient déjà dans un état de combinaison savonneuse.

IX. Les engrais purement salins, tels que la marne, la craie, la chaux, le sel de cuisine & tous les sels quelconques, produisent de bons effets, si la terre qui les reçoit a déjà une suffisante quantité de substance animale ; mais si cette dernière en est dépourvue, ou si elle est en trop petite proportion, leur usage devient funeste. (Voyez l’expérience du jardinier de milord Robin Manner, décrite au mot Arrosement, tome II page 10, seconde colonne. Tout engrais purement salin produit en général le plus mauvais de tous les effets sur les champs situés à quelques lieues de la mer ; à moins que le climat n’en soit très-pluvieux. Partout ils exigent des engrais animaux & végétaux, & ces engrais doivent y être répandus lorsque l’on donne le premier labour aux terres, & non au moment de les ensemencer suivant la coutume de plusieurs endroits ; on comprend sur quoi ce principe est fondé.

X. On sait que la marne produit peu d’effet sur les terres pendant les premières années ; mais si on ajoute avec elle des engrais animaux, son action est vive & prompte.

XI. Ces observations donnent la solution du problême proposé deux ou trois fois par différentes académies : Les labours peuvent-ils suppléer les engrais ? C’est à l’état auquel la terre est réduite à décider leur nécessité.

XII. À quelle profondeur, combien de fois, & quand faut-il labourer ? Si la terre est bonne, elle sera assez divisée à sept ou huit pouces de profondeur ; puisque les racines des blés ne pénètrent pas plus avant ; pour les luzernes à un pied. Les labours multipliés coup sur coup ne sont utiles qu’autant qu’ils divisent les molécules de la terre ; mais ils troublent & dérangent les combinaisons & les unions des principes qui s’exécutent. Le nombre & le temps le plus propre aux labours, sont d’en faire 1°. un aussitôt après que la moisson est levée, & qui enterre le chaume ; 2°. un à l’entrée de l’hiver, s’il se peut, par un temps sec ; c’est l’époque de répandre l’engrais & de l’enterrer par ce labour ; 3°. un après l’hiver ; 4°. deux labours croisés avant de semer. Voilà pour les partisans des jachères. Tous ces labours doivent être faits à la charrue à versoir,