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plus grand nombre, puisqu’une partie de les feuillets doit être détruite, & sous la forme d’épiderme, & sous la forme de liber.

Ceci demande quelque développement. Je suppose que l'écorce, dans son état de perfection, doive être composée de dix feuillets, par exemple, que ces dix feuillets doivent occuper une ligne entière, que l’arbre qui la porte doit mettre dix ans pour acquérir tout son accroissement, après lequel temps il commencera à dépérir : ces dix feuillets existent dans l’écorce de la plume & de la radicule, dans la graine, mais ils n’ont qu’un dixième de ligne d’épaisseur. Après la première année révolue, l’écorce a augmenté en largeur par l’affluence des sucs nourriciers, & le développement de la masse totale ; (voyez le mot Accroissement) alors elle aura de ligne d’épaisseur ; la troisième année l’augmentation sera plus forte, & elle aura de ligne, & ainsi de suite jusqu’à la fin de la dixième année, où elle aura la ligne entière d’épaisseur. Dans tout cet accroissement, il ne s’est point formé de nouveaux feuillets ; ce sont les dix qui se sont séparés, & ont pris toute l’épaisseur que la nature leur avoit attribuée pour être parfaits.

Que l’on applique cette comparaison à un plus grand nombre de feuillets, & l’on aura, je crois, la solution de ce beau problème de botanique.

La nature, en formant une plante, un individu quelconque, qui doit jouir de la vie & de la faculté de se développer, le produit avec tout ce qu’il doit avoir pour être parfait. Ainsi le germe en petit, est tout ce que sera un jour l’individu en grand, si rien ne s’oppose au développement de toutes les parties. La plante que nous avons mise en supposition, doit être dix ans à parvenir à son entier accroissement. Si des circonstances particulières altèrent sa santé, & avancent sa vieillesse, elle aura acquis le terme moyen de sa vie, avant que son développement total ait eu lieu ; alors l’écorce, au lieu d’avoir une ligne d’épaisseur, n’aura que de ligne ; mais elle aura toujours ses dix feuillets. Si, au contraire, une surabondance de nourriture, ou une nourriture succulente l’engraisse, pour ainsi dire, & lui fait avoir un embonpoint extraordinaire, le développement aura été plus considérable, nous aurons de ligne ; mais malgré cela, on ne retrouvera que les dix feuillets.

On peut faire peut-être l’application de ces principes à la formation des couches ligneuses. Des observations ultérieures les confirmeront sans doute.

Un second phénomène non moins intéressant, c’est celui de la régénération de l’écorce qui a péri par quelqu’accident, ou qu’on a enlevée.

M. Bonnet, dans les Œuvres duquel j’ai puisé les principes que je viens d’exposer, va lui-même en donner l’explication.

Voici ses propres paroles. (T. III. de ses Œuvres, in-4°. pag. 34.)

« Si toutes les parties d’un corps organisé existoient en petit dans le germe, s’il ne se fait point de nouvelle production, comment concevoir la formation d’une nouvelle écorce, d’une nouvelle peau ? &c. Toutes les fibres d’un corps organisé ne se développent pas à la fois ; il en est un grand