Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/237

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terres, la paille est encore entière & le fumier n’est pas pourri. En Flandre, par exemple, l’eau qui reste après l’enlèvement du fumier, est jetée dans des tonneaux chargés sur des charrettes, & ensuite répandue sur les champs ; mais voilà plus d’un triple & quadruple emploi de voiturage : n’auroit-il pas mieux valu, & n’auroit-il pas été plus économique d’avoir du fumier fait ? il en auroit beaucoup moins coûté. Je conviens que cette eau, dispersée sur les blés à la fin de l’hiver, est très-efficace, qu’elle leur donne de la vigueur, ranime leur végétation ; ils n’en auroient pas eu besoin, si les principes du fumier avoient été combinés, & si la terre se les étoit assimilés avant le temps des semailles. L’économie & le produit sont tous à l’avantage de la première méthode. J’invite ceux qui par habitude noient leurs fumiers, d’en préparer une partie suivant la manière que j’indique, & de porter ensuite les deux engrais sur un champ de même nature ; ils jugeront alors laquelle des deux méthodes est préférable. Rien n’instruit mieux que l’expérience, sur-tout quand elle est faite de bonne foi dans l’intention de connoître la vérité.

Ces cours à fumier sont ordinairement pavées, & même la précaution est indispensable ; mais je n’en ai vu aucune capable de contenir toutes les eaux pluviales. Du moment que la surabondance est obligée de fuir, pourquoi souffrir cette perte, cette soustraction de principes ? Si j’étois possesseur d’une pareille métairie, j’établirais la pente de la cour vers un champ, & dans ce champ je creuserais plusieurs fosses à la suite les unes des autres, & qui se communiqueroient ; remplies de pailles, de débris de végétaux, elles recevroient ces eaux & deviendroient de véritables creux à fumier.

On peut, il est vrai, au moyen de ces cours, faire pourrir une grande quantité de paille. On en pourriroit une bien plus grande quantité, si, lorsqu’elles sont bien pénétrées du jus de fumier, on les jetoit dans la grande fosse à fumier ; & si, lit par lit, on y plaçoit du sable, de la terre, &c. la fermentation s’établirait très-promptement, & sa chaleur seroit très-vive. On en peut juger par la chaleur des couches, (voyez ce mot) faites uniquement avec des pailles imbibées assez légèrement d’urine, & desquelles on a séparé le crotin. Dans ce cas, les grandes cours offrent un avantage précieux, & il est possible d’y quadrupler la quantité du fumier & sur-tout du fumier fait.

Ce cloaque, ou cette grande cour, environné par les maisons, est un foyer de putridité qui vicie l’air que respirent ceux qui les habitent ; il est moins dangereux, sans doute, dans nos provinces du nord, où les pluies sont fréquentes & la chaleur modérée ; mais il seroit très-mal-sain dans celles du midi. Éloignez donc de vos demeures tout ce qui altère la pureté de l’air ; de sa salubrité dépend la santé des valets, & de leur bonne santé, la bonne culture.

II. Des excrémens des bœufs & des vaches. On appelle communément ces engrais froids ; ils ne sont cependant pas plus froids intrinsèquement que ceux du cheval, &c ; ils sont moins actifs, parce qu’ils ont moins de principes constituans. Cela proviendroit-il de la rumination du bœuf ? car, en général, sa nourriture est la même