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quatre livres de petite bière, qu’on réduit à trois ; on en donne la colature à l’animal malade ; on lui présente encore de l’eau de gruau presque tiède, & sur le soir, une once de diascordium dans deux ou trois livres d’eau chaude.

Si l’animal est constipé après la crise, & si la peau s’attache à la chair, il faut lui donner sur le soir une once de sel d’epsom, mêlée avec du son ; mais il faut attendre que la crise soit entièrement passée. Lorsque la guérison est avancée, on fait prendre à l’animal une médecine un peu plus forte que le breuvage qui a servi à favoriser la grande crise.

M. Demars, médecin-pensionnaire de la ville de Boulogne, a donné un mémoire, dont voici l’extrait, sur l’épizootie des moutons, qui régna dans le Boulonnais, les années 1761, 1762.

1°. La maladie des moutons commença vers la fin d’octobre de l’année 1761, continua tout l’hiver & jusqu’au milieu du printemps ; elle fit plus de ravage aux mois de janvier & de février que dans les précédens, & se ralentit peu à peu en mars & avril. 2°. Dans les cantons bas, humides, marécageux, tels que les fonds de Bainetun, Carly, Isques, & en général, dans tous ceux qui ont été inondés au mois de mai de l’année 1761, on a souffert les plus grandes pertes, tandis que, dans les lieux élevés, secs & sablonneux, & sur-tout le long des dunes, de Lumiers, Danes, Ambleteuse, les troupeaux ont été généralement préservés de la maladie. 3°. Les agneaux ont été plus sujets à la maladie que les mères. 4°. De tous ceux qui ont été manifestement attaqués, il n’en est réchappé aucun, 5°. Ces animaux périssoient par hydropisie & par pourriture ; on trouvoit souvent de l’eau dans la tête, entre cuir & chair : la maladie s’annonçoit par des bourses pleines d’eau, qui se formoient sous les branches de la mâchoire postérieure ; le ventre se remplissoit pareillement d’eau ; les principaux viscères du bas ventre étoient corrompus ; le foie donnoit des indices d’une pourriture complète, on y observoit une grande quantité de vers plats que les gens du pays appelloient dogues. 6°. Les moutons attaqués de la maladie ont continué, jusqu’à la fin, de boire & de manger avec assez d’avidité ; ils léchoient les pavés des bergeries & mangeoient la terre. 7°. Leur embonpoint diminuoit peu, mais les chairs étoient pâles & n’avoient pas leur saveur ordinaire ; & en général, tous les moutons, tant sains que malades, qui ont été mangés pendant l’automne & l’hiver, étoient fort insipides. 8°. On a essayé peu de remèdes, mais aucun de ce petit nombre n’a réussi. 9°. Les autres bestiaux, tels que les chevaux, les vaches, porcs, n’ont point été attaqués de cette maladie, mais les avortemens ont été très-fréquens, plusieurs ont été attaqués de feux opiniâtres ; tous ces faits sont les résultats des lettres ou mémoires envoyés par MM. les curés des endroits où régnoit l’épizootie.

M. Demars cherche la cause dans les intempéries des saisons. Les pluies, dit-il, commencèrent dès le mois d’août de l’année 1760, & les vents du sud-ouest diminuèrent jusqu’au mois de mars, & furent peu interrompus par ceux du nord. À peine