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pour la pâture de ces animaux, le régime qu’on leur fait garder selon les différentes saisons, peuvent encore contribuer à faire connoître les causes de l’épidémie dont il s’agit, & qui fait actuellement l’objet de nos recherches.

Les côteaux & les plaines élevées au-dessus des collines, sont les lieux qui conviennent le mieux aux brebis ; la pâture dans les endroits bas, humides & marécageux ne leur est pas favorable. La nourriture qu’on leur donne pendant l’hiver à l’étable, est du son, des navets, du foin, de la paille, de la luzerne, du sain-foin, des feuilles d’orme, de frêne, &c. On les fait sortir presque tous les jours dans cette saison, à moins que le temps ne soit fort mauvais, plutôt pour les promener que pour les faire pâturer. On ne les conduit aux champs que sur les dix heures du matin ; on ne les y laisse que quatre à cinq heures ; on les ramène vers les trois heures. Mais au printemps & en l’automne on les laisse plus long-temps à la campagne ; on les fait sortir de la bergerie dès que le soleil a dissipé la gelée & l’humidité, on ne les y ramène qu’au soleil couchant. Dans ces deux saisons on ne les fait boire qu’une fois par jour, de même que pendant l’hiver ; un peu avant que de les faire rentrer à la bergerie on prépare dans leur râtelier du fourrage à leur arrivée : mais cependant en quantité moindre que pendant l’hiver. On ne leur donne aucune nourriture à la bergerie pendant l’été, les brebis prennent pendant cette saison toute leur nourriture aux champs ; on les y mène deux fois par jour, & on les fait boire aussi deux fois ; on les fait sortir de grand matin ; on attend que la rosée soit tombée pour les laisser paître pendant quatre ou cinq heures, on les fait ensuite boire & on les ramène à la bergerie ou dans quelque endroit à l’ombre : sur les trois ou quatre heures du soir on les mène paître une seconde fois jusqu’à la fin du jour. Telle est la méthode qu’on doit suivre pour gouverner les moutons dans chaque saison : mais malheureusement on ne l’a pas pratiquée dans le pays où a régné l’épidémie.

1°. Le bas-Boulonnois, à l’exception des dunes, est naturellement humide ; il ne s’y trouve que très-peu de terreins secs : le serpolet & les autres herbes odoriférantes, telles que les différentes espèces de calament, l’origan, le clinopodium ne se trouvent pas dans les terres crétacées du haut-Boulonnois.

2°. La médiocrité de la récolte, le grand nombre de bestiaux que le défaut de vente a fait rester dans le pays, exigeoient des attentions d’économie sur la consommation des fourrages ; on a continué de mener paître de bonne heure, & de ramener tard, en automne comme en été, afin que le mouton prît aux champs presque toute sa nourriture, & que ses provisions fussent épargnées : ce qui n’auroit point eu de suites funestes dans une année bien tempérée, a été, dans une année trop humide, la principale cause de la perte de ces animaux ; le troupeau rentroit au bercail si mouillé, qu’à-peine pouvoit-il ressuyer, & la nourriture qu’il prenoit étoit beaucoup chargée d’eau ; enfin, les fourrages furent, en général, de mauvaise qualité ; les pluies perpétuelles multi-