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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/300

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la jaunisse & l’hydropisie ; les feuilles de tilleul sont dessicatives ; le genêt chasse les sérosités, il est également indiqué dans les obstructions du foie, de la rate & du mésentère. En général, toutes les feuilles d’un goût austère & d’un tissu ferme & solide, semblent propres à corriger l’intempérie qui domine dans la maladie des moutons du Boulonnois, en desséchant la trop grande humidité, & réprimant les progrès de la pourriture : il ne faut cependant pas attendre que la maladie ait jeté de trop profondes racines ; dès l’été même, il en faut donner aux moutons, lorsqu’on a tout lieu de craindre les funestes effets des saisons trop pourrissantes.

En 1762 il parut dans les environs de Beauvais, une maladie épizootique, qui attaqua les moutons. M. Borel, lieutenant-général de Beauvais, directeur du bureau d’agriculture de la même ville, dit que cette maladie se manifestoit par le dégoût & la tristesse de l’animal ; quelques-uns l’avoient apperçu vingt-quatre heures avant l’éruption, & les plus attentifs, deux ou trois jours plutôt ; mais le plus grand nombre, après l’éruption commencée. Le dégoût étoit proportionné au degré de la maladie, les moutons les moins gravement attaqués continuoient à manger ; les plus malades ne mangeoient rien d’eux-mêmes, on les soutenoit comme on pouvoit : ils étoient tous très-altérés, & on leur donnoit à tous de l’eau ; dès qu’ils étoient atteints du mal, ils cessoient de ruminer, leurs yeux étoient chargés, enflés, larmoyans, ils devenoient très-obscurs ; souvent les deux paupières se colloient l’une à l’autre, le malade ne voyoit plus ; plusieurs de ceux qui avoient été guéris avoient perdu un œil ; quelques autres étoient aveugles, la prunelle même étoit tombée, dans quelques-uns, en pourriture. Il ne restoit plus de trace d’humeurs, de muscles, de membranes dans la capacité de l’orbite. Ils jetoient par les naseaux une morve épaisse, tenace, de couleur de pus, le plus souvent blanche, rarement jaune ; les forces leur manquoient pour suivre le troupeau, ils s’abattoient & restoient, pour ainsi dire, au lieu où ils étoient tombés ; leurs oreilles étoient très-froides ; cependant cette circonstance n’étoit pas générale. Nulle agitation, ils restoient en place ramassés dans le moindre volume possible, absorbés, la tête penchée vers la terre autant qu’elle peut l’être, la queue entre les jambes, les parties postérieures rapprochées des antérieures, sans paroître souffrir de tranchées. Ils étoient oppressés en proportion du mal. Quand ils en étoient atteints jusqu’à la mort, ils se plaignoient dans les dernières vingt-quatre heures ; les flancs leur battoient ; s’ils guérissoient, leur laine tomboit aux places où il y avoit eu éruption, leurs déjections étoient à-peu-près les mêmes qu’en santé, plus sèches encore, & plus en crottes noires que dans l’état naturel. Les boutons étoient exactement des boutons de petite vérole ; il y en avoit de plusieurs formes & de plusieurs couleurs. Il y en avoit de parfaitement ronds, les uns discrets, les autres concrets ; ceux-ci étoient ellyptiques, ceux-là avoient la forme de petits haricots plats & oblongs : tous étoient d’abord rouges, mais ensuite les uns blanchissoient, se cre-