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ment connue dans peu de provinces du royaume, j’ai pensé que ceux qui n’ont pas les ouvrages de M. Duhamel, seroient peut-être charmés de l’adopter, attendu qu’elle est très expéditive & très-économique : l’auteur va parler.

La posture des faucheurs est un article important à remarquer ; en fauchant les prés & les avoines, le faucheur chemine & trace deux lignes parallèles avec ses pieds, qu’il traîne alternativement à chaque coup de faux. Dans le fauchage du blé, le chemin du faucheur ne doit être tracé que par une simple ligne, parce que le faucheur doit porter un pied l’un devant l’autre, de façon qu’à chaque coup de faux, le pied gauche, qui reste en arrière, chasse en avant le pied droit, posture assez semblable à celle que l’on prend, lorsque, le fleuret à la main, on va commencer un exercice d’armes. Cette manière de porter son corps est indispensable lorsqu’on se sert de cette faux ; l’ouvrage en va plus vite, & la manière ordinaire de faucher auroit bientôt excédé l’ouvrier & anéanti ses forces.

Voilà le mécanisme de cette opération sur les blés, supposés droits, c’est-à-dire, dans les années les plus favorables ; il faut ajouter, que le faucheur doit avoir l’attention de s’orienter pour son travail, de façon qu’il ait le vent à sa gauche, parce qu’alors le blé se trouve naturellement incliné sur la faux, & qu’on peut le couper plus près de terre : la résistance du vent, toute légère qu’elle soit, appuie sur le playon, le blé qui vient d’être coupé, & la fauchée en est mieux & plus promptement portée sur le blé qui est en core debout, d’où elle doit être enlevée par le ramasseur.

Le vent derrière le faucheur n’est pas un obstacle à faucher près ; mais la fauchée ne sauroit être exactement réunie par le playon, il s’éparpille quelques épis, & le plus grand inconvénient est que la fauchée qui est déposée sur le blé encore sur pied, perd son appui & qu’il est souvent jeté à terre par le vent, ce qui rend l’opération du ramasseur plus difficile & plus lente, & occasionne plus de glanures.

Le vent en face ne vaut rien ; il occasionne une perte du chaume, & une grande dispersion des épis. Enfin, le vent à droite fait la plus mauvaise de toutes les besognes : alors le chaume reste long, & le champ se trouve jonché d’une quantité de glanures, si prodigieuse, qu’on ne croiroit pas qu’il eût été récolté.

Lorsque les blés sont coudés, le faucheur les doit prendre dans le sens que lui présente leur courbure de gauche à droite ; ce qui fait le même effet, lorsque le temps est calme, que si le vent venoit de fa gauche.

Lorsque les blés sont versés, il n’est pas facile de faucher en dedans, parce que le ramasseur se trouveroit sans cesse embarrassé par le mélange de sa javelle avec le blé non-fauché ; le coup-d’œil d’un bon faucheur jeté sur une pièce, le décide sur la façon de s’orienter ; quand le vent peut être favorable, il en profite. La méthode la plus ordinaire est celle de prendre le blé dans le sens de fa courbure, & de le jeter en ondain : l’ouvrage en est plus propre ; on ne voit après le faucheur aucun reste de chaume ; & le champ ne semble plus être qu’une prairie.