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maturité, contient ces deux principes par excellence, & plusieurs autres dont l’existence sera démontrée au mot Raisin. Ce n’est pas le cas d’en parler ici, puisqu’ils ne sont pas la cause efficiente de la fermentation ; parmi eux, l’air est le seul qui y concoure.

Chaque raisin, suivant son espèce, suivant sa maturité, le sol & l’exposition de la vigne, renferme un muqueux dont les propriétés sont différentes, ainsi que la proportion du principe sucré, & la quantité plus ou moins forte d’eau de végétation ; cependant, c’est de la combinaison exacte de ses substances que dépend la qualité du vin.

Le principe sucré ne change jamais sa manière d’être ; son développement seul subit différentes modifications. Il n’en est pas ainsi du corps muqueux contenu dans le raisin ; il acquiert suivant les circonstances, des transitions très-marquées & très nombreuses, qu’on peut réduire à quatre générales, d’où dépendent toutes les autres. Le muqueux est, 1°. fade ou insipide, 2°. acide ou aigre, 3°. austère ou âpre, 4°. doux ou sucré ; tous les quatre unis au principe sucré, fournissent un vin, chacun à leur manière : voyons comment ils se comportent.

I. Le muqueux fade, abstraction faite de son union au principe sucré, (comme les gommes) placé dans la position la plus avantageuse à la fermentation, c’est-à-dire, étendu dans une assez grande quantité d’eau, exposé à l’air libre & à un degré de chaleur convenable, éprouve la fermentation acide, & bientôt après pourrit. Si, dans le commencement, #n ajoute à cette liqueur, l’esprit ardent en plus grande quantité que n’en fourniroit le meilleur vin, son acidité se manifeste beaucoup plus promptement, parce qu’on n’a point ajouté de principe sucré. La conclusion à tirer de cette expérience, est qu’un vin tiré du raisin où le muqueux fade domine, est très-sujet à pousser, ou pour mieux dire à pourrir.

II. Le muqueux acide, comme le suc de groseille, de citron, &c. mis dans les mêmes circonstances que le précédent, se soutient pendant quelque temps dans son acidité, & passe plus lentement à la putridité que le muqueux fade, parce qu’on ne connoît point de substances végétales acides, qui ne contiennent plus ou moins en même temps du muqueux doux ou principe sucré, seul réservoir d’où la nature tire les esprits ardens. Lorsque ce muqueux acide a subi la fermentation, il donne peu d’esprit ardent, & il est démontré que plus une liqueur (parvenue à l’acidité par le second degré de fermentation dont on a parlé) a contenu d’esprit ardent par le premier, plus elle se soutient long-temps dans ce second état, & passe moins promptement à la fermentation putride. Par exemple, le vinaigre se conserve plus longtemps que le jus de citron ; parce que le vin changé en vinaigre contenoit plus de muqueux doux avant cette nouvelle métamorphose, & par conséquent plus d’esprit ardent.

III. Le muqueux âpre, lorsqu’il a subi la première fermentation, produit un vin qui contient du muqueux doux ; mais il est dur, austère, astringent : en un mot, il garde toutes les nuances du corps muqueux qui l’a produit. Le genre d’altération auquel ce vin est