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sont obligés de permettre au maître valet chargé de la nourriture des gens de la ferme, de semer une certaine mesure de fèves par nombre de charrue, & l’on doit penser que le maître-valet choisit le meilleur champ parmi ceux qui reposent ; & s’il peut y voiturer du fumier en cachette, il ne l’épargnera pas.

Dès qu’on ne craint plus les effets des gelées, on laboure la terre, on la croise ensuite, & une femme ou un enfant, tenant un panier plein de fèves à son bras, marche après la charrue pendant le second labour, & y jette le grain. Le coup de charrue qui trace le sillon suivant, recouvre le sillon semé, & l’opération est finie.

Il n’en est pas ainsi dans la Guyenne, où les fèves forment une grosse récolte. On donne deux labours croisés avant l’hiver, aux mois d’octobre & de novembre, & on choisit le moment que la terre n’est ni trop sèche ni trop humectée. En février on répand les fumiers dans ces sillons, & on croise & recroise de nouveau. Je crois qu’il vaudroit beaucoup mieux fumer lors de l’un des deux labours avant l’hiver, parce que l’engrais auroit le temps de s’unir & de former des combinaisons avec les sels de la terre, & de préparer les matériaux savonneux de la sève. (Voyez les mots Amendement, Engrais & le dernier Chapitre du mot Culture)

Avant de semer, si la terre est sèche, on peut faire tremper les fèves dans l’eau pendant quelques heures, elles lèveront plus facilement.

Dans quelques endroits on sème tous les sillons, ainsi qu’il a déjà été dit ; dans d’autres, on passe & repasse dans le même sillon, afin de lui donner plus de largeur & plus de profondeur, & pour mieux former le dos d’âne ; enfin, dans d’autres, on espace ces sillons de quatre à cinq pieds.

La fève communément choisie pour les champs, est celle nommée d’abondance. Dans quelques endroits on la sème à la volée, méthode défectueuse qui met des obstacles au sarclage, & empêche de les serfouir commodément ; il vaut mieux, quoique l’opération soit plus longue, se servir du plantoir des jardiniers, faire deux trous sur le tiers de la hauteur du dos d’âne, à la distance de deux pouces l’un de l’autre, & dans chacun placer une féve, & recommencer ensuite à faire deux autres trous à la distance d’un pied, de manière que ce sillon une fois garni, & les suivans à proportion, les fèves soient toujours espacées d’un pied.

Comme les animaux, ou plusieurs circonstances fâcheuses font souvent périr des pieds, c’est par cette raison qu’on sème deux fèves l’une à côté de l’autre, mais au premier labour, lorsque la plante a poussé, on attache le pied surnuméraire, & on laisse le mieux venant : si on a planté les sillons à cinq pieds de distance, on peut travailler la terre à la charrue à oreille, de manière que l’oreille verse la terre contre la plante ; si les plantes sont seulement espacées d’un pied, il faut travailler à la houe. Plusieurs cultivateurs, un mois après le premier labour, en donnent un second semblable au premier, de manière que la fève se trouve alors très-bien buttée.

IV. De la culture des fèves pour fourrage. Les préparations de la terre