Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/609

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le nombre, aussi petit qu’il est possible, mais de volume cependant à tomber sous nos sens ; toute fibre, dis-je, composée, est douée de certaines propriétés qui influent, ou plutôt, qui sont le principe & les agens de la vie végétale. Ces propriétés sont la transparence, la flexibilité, l’élasticité, &, par conséquent, la faculté de pouvoir être alongée, & de tendre continuellement à reprendre son premier état, & l’irritabilité.

1°. La transparence dans la fibre végétale, n’existe pas moins dans la fibre animale, & consiste à transmettre en tout sens les rayons de la lumière. Regardez au microscope un réseau végétal ; de quelque nature qu’il soit, vous vous appercevrez facilement de la transparence de toutes les fibres. Non-seulement cette propriété existe dans la fibre végétale vivante, mais encore après la mort de la plante & des feuilles. Des tissus desséchés, que j’ai examinés au microscope, long-temps après que je les avois détachés de la plante, m’ont offert le même phénomène. J’ai même observé, dans plusieurs circonstances, qu’elle pouvoit, dans bien des cas, décomposer les rayons du soleil, à la manière des prismes ; ce que j’ai jugé par les iris & les couleurs variées dont étoit accompagnée chaque fibre. Toute fibre ne paroît pas toujours transparente, sur-tout lorsque formant un vaisseau, elle est pleine d’un suc coloré, ou visqueux, ou gommeux ; alors les rayons sont réfléchis, & ne pénètrent pas au travers, ou se perdent ; il faut la comparer à un tube de verre qui seroit rempli d’une liqueur épaisse & opaque. Mais où la transparence paroît le mieux, c’est dans les endroits ou plusieurs fibres s’anastomosent entr’elles dans les plexus ; l’espace vide ou imbibé d’une liqueur transparente, laisse passer un très-grand nombre de rayons lumineux.

2°. Toute fibre végétale est flexible ; c’est une vérité dont il est très-facile de s’assurer. La flexibilité générale d’une plante, d’une tige, d’une partie ligneuse, ne résulte que de la flexibilité partielle de chaque fibre en particulier. Toutes les parties molles, les feuilles, les supports, les pétales, les pistils, les filets, les poils, les fruits, &c., offrent cette propriété ; ajoutons encore qu’on la retrouve la même dans les portions les plus dures & les plus solides. Il ne faut, pour la faire paroître, que diminuer leur épaisseur, les réduire en petits faisceaux où en petites lames ; elles seront susceptibles d’être pliées, courbées, sans se rompre. Que l’on jette les yeux sur ces arbres dont les troncs majestueux annoncent, par leur diamètre, qu’ils sont aussi anciens que la terre qui les nourrit ; aucune force humaine ne peut les ébranler : qu’un vent impétueux s’élève sur l’horizon, qu’il vienne déchaîner sa furie sur cet arbre, & bientôt vous le verrez s’incliner, se plier & se redresser, suivant la direction du vent. Une expérience plus simple & plus amusante démontre cette vérité : frappez rudement avec un marteau sur le tronc de cet arbre, & vous verrez à chaque coup frémir toutes ses feuilles ; le mouvement s’est donc communiqué jusqu’à l’extrémité, & cette communication est due à la flexibilité de chaque fibre. Si ces fibres, quoique flexibles naturellement, se touchoient exactement