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dans tous leurs points, & qu’elles ne pussent pas couler les unes finies autres jusqu’à un certain point, alors il n’y aurait plus de flexibilité, au contraire, une rigidité succéderait. La vie végétale, comme la vie animale, conduit à cet état, & la partie ligneuse d’un arbre ne durcit, que parce qu’il se dépose entre les fibres des sucs qui solidifient les parties voisines, que parce qu’elles sont comprimées de plus en plus par les couches extérieures, qu’en un mot, elles s’ossifient, pour ainsi dire. (Voyez le mot Accroissement)

3°. Si la fibre végétale n’étoit que flexible, elle pourroit à la vérité être pliée dans tous les sens ; mais elle resteroit dans la situation où elle auroit été mise, & il faudroit qu’une nouvelle force la rétablît dans son premier état ; mais nous voyons constamment un effet contraire. Une fibre végétale pliée se rétablit & revient dans sa première situation ; elle est donc douée plus ou moins force élastique. Mille preuves concourent à démontrer cette vérité : courbez légèrement une plante, une tige ; dès l’instant qu’elle sera libre, elle se redressera ; arrachez un filet de l’écorce ou des couches ligneuses, tentez le même essai, vous aurez le même résultat. Il est un genre d’élasticité que l’on trouve dans la fibre animale, la rétraction, par laquelle les deux portions d’une partie coupée par un instrument tranchant, se retirent sur elles-mêmes & se raccourcissent. En quelque sens que l’on coupe des chairs, des membranes, &c. cette rétraction a toujours lieu ; c’est à elle qu’il faut attribuer l’ouverture des plaies où il n’y a que simple solution de continuité. Ce genre d’élasticité se retrouve dans la fibre végétale, à la vérité moins énergiquement. Faites une incision à une plante vivante, sur l’écorce d’un arbre, par exemple ; à peine l’instrument aura-t-il pénétré & coupé quelque fibre, que vous verrez sur le champ les deux portions coupées se resserrer ou plutôt se retirer sur elles-mêmes, & il se formera une plaie entr’ouverte, beaucoup plus large que de tranchant de l’instrument qui a servi à la faire. L’élasticité ne suit pas toujours la raison de la flexibilité, & les parties les plus flexibles ne sont pas toujours les plus élastiques ; on pourrait même croire le contraire, car les feuilles, les corolles, les pétioles, les filets qui sont très-flexibles, sont moins élastiques que les tiges, les branches, les racines qui sont peu flexibles en comparaison.

La flexibilité & l’élasticité supposent une autre faculté qui en dépend, cependant ; c’est la disposition à l’alongement, nommé dans la physiologie animale, distractilité. Cette faculté permet à la fibre de s’alonger jusqu’à un certain point, mais en faisant néanmoins continuellement effort pour retenir toutes ses parties, & empêcher leur séparation ; car alors il y aurait solution de continuité, fraction, rupture. Cette propriété est très-sensible dans certaines parties végétales, sur-tout dans les fibres corticales. Que l’on prenne un fil de lin ou de chanvre ou d’ortie, mais simple & non composé de plusieurs, en le tirant par les deux bouts, il s’alongera sensiblement : courbez un morceau de bois, une planche, la ligne courbe qu’il décrira sera aussi sensiblement plus