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dans sa parfaite maturité, d’imiter le procédé de la nature, c’est-à-dire, de la déposer lit par lit avec du sable, non pas trop sec, & tenu dans un lieu peu humide, jusqu’à l’époque des semailles.

On sème la graine de garance comme le blé, à la volée, ou à la main, en suivant les sillons. Cette seconde méthode, quoique plus longue, est à préférer, parce que le grain est disposé par rangée, & il est plus facile, au printemps, & pendant l’été, de sarcler les rangées sans nuire aux bonnes plantes. On peut évaluer, au poids, à dix livres au plus la quantité de semence suffisante pour 400 toises quarrées, & même diminuer du poids en raison de la bonté du sol.

Si on peut arroser par irrigation à la manière des provinces méridionales, il vaut beaucoup mieux semer un seul sillon sur deux rangées, & laisser un sillon & demi entre deux, ou du moins un sillon ; par ce mot, on ne doit pas entendre un sillon tel que celui formé par la charrue en labourant, ni le billon, (voyez ce mot) mais le sillon qui sera décrit au mot Jardin potager, & tel qu’on le dirige pour être arrosé par irrigation dans les provinces du midi. Cependant le billon de trois à quatre pieds de largeur pourroit servir en laissant un billon vide entre chaque billon planté en garance.

Si on a semé en pépinière, il faut replanter l’année suivante dans un terrain préparé ainsi qu’il a été dit. On ouvre de petites fosses de huit pouces de profondeur sur six pouces de largeur, pour recevoir les jeunes plants, mais les unes après les autres ; ainsi, une planche de quatre pieds se trouve garnie de huit rangs, & un sillon l’est de six. Je préférerois la méthode de donner un pied d’intervalle entre chaque rangée.

Pour tirer les plançons de la pépinière, on commence par un bout, & on y ouvre une tranchée d’un pied de profondeur, afin de cerner la terre en dessous des racines, & de les en séparer sans les endommager ; alors la plante vient entière, sans peine, sans déchirure, à la main du travailleur. On met ces plantes dans des paniers, des corbeilles, &c. elles y sont recouvertes avec des feuilles de choux, ou tel autre herbage, afin de les tenir fraîchement ; elles sont ainsi transportées à la garancière, & l’ouvrier en prend dans les paniers à mesure qu’il les plante.

La plantation exige deux ouvriers ; l’un tient la garance, étend les racines fibreuses & l’autre les couvre avec la terre tirée du petit fossé. Si les racines sont longues, le premier ouvrier, armé d’une cheville, fait des trous dans ce même fossé, & y dispose les plus longues racines, de manière cependant que le collet de la plante ne soit jamais recouvert de plus de trois pouces de terre lorsque le fossé est comblé. Ce fossé achevé, on en recommence un autre, & ainsi de suite pour toutes les planches. Chaque pied doit être espacé de quatre à six pouces l’un de l’autre, & le vrai temps de le mettre en terre, est le mois de septembre ou d’octobre.

Je sais que cette manière de transplanter paroîtra minutieuse à ceux qui ne comptent pour rien les racines, & qui ont la manie de les raccourcir,