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que la lumière du soleil produit dans tous les corps qu’elle pénètre. L’eau, en s’élevant, entraîne nécessairement les particules du fluide électrique disséminé dans toutes les substances sublunaires ; ou peut-être même, cette eau se charge-t-elle de molécules de lumière qui, en s’insinuant dans les pores des corps, s’y combinent avec eux, & adhèrent assez fortement pour qu’elles accompagnent les vapeurs & les exhalaisons dans leur ascension à travers l’atmosphère. De plus, les nuages s’électrisent encore dans les régions élevées de l’air, en s’imbibant du fluide lumineux, sur-tout, si celui-ci est le principe de l’électricité, comme je le pense, & que tout porte à le croire.

2°. Le nuage ainsi électrisé restera dans cet état jusqu’à ce que quelques causes étrangères lui soutirent cette quantité ; mais il ne s’en dépouillera pas de lui-même : comme une bouteille de Leyde, le Tableau magique, l’Electrophore de M. Volta, ne perdent leur électricité que lorsque l’air ambiant, moins électrisé, pompe, pour ainsi dire, & s’approprie la quantité dont on avoit surchargé ces corps. Mais quand l’équilibre est rétabli, l’électricité est insensible & dans le corps électrisé & dans les corps environnans. De même, le nuage, tant qu’il ne sera pas électrisé en plus, ne donnera aucun signe d’électricité, quoique cependant il en contienne.

3°. S’il n’électrise en plus, ou par son mouvement rapide dans l’atmosphère, (car le nuage peut être comparé, dans ce moment, au plateau d’une machine électrique, & l’air aux coussins) ou par quelques causes par séculières, il doit se garnir d’aigrettes, tendre à se dépouiller de cette surabondance d’électricité ; ce qui arrivera à l’approche d’un nuage qui en contiendra moins. Le fluide, pour se mettre de niveau, s’élancera de celui qui en contiendra davantage, dans celui qui en contiendra moins. Si ce nuage vient à passer près d’une haute montagne, il en sera attiré, il descendra & rendra au grand réservoir, c’est-à-dire à la terre, une portion de son superflu. Cette décharge & ce dépouillement se fera par le moyen d’une étincelle proportionnée à la quantité d’électricité renfermée dans son sein. Voilà tout naturellement le tonnerre.

Feriunt…… summos fulmina montes.

Si, au contraire, ce nuage rencontre des pointes, il se dépouillera insensiblement sans bruit & sans éclat.

Tel est l’état d’un nuage considéré comme électrique, c’est-à-dire, tel est l’état du fluide électrique intimément uni aux vapeurs d’un nuage. Mais comment se comportent ces vapeurs ainsi électrisées ?

Suivant l’idée ingénieuse de M. de Morveau, il s’établit une évaporation dès le premier instant de l’électricité du nuage. Je croirai, au contraire, que cette évaporation n’a lieu que lorsque le nuage électrisé en plus, & surabondamment chargé, commence à s’en dépouiller d’une partie : car, autrement, le nuage étant continuellement électrique, l’eau s’évaporeroit continuellement, & nous aurions, au lieu de pluie, une grêle, ou au moins une neige continuelle ; ce qui est opposé à l’expérience journalière. De plus, on