Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/457

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» Ce ne sont pas là les seuls avantages du choix de cette saison pour faire les marcottes ; il convient singulièrement à certains arbres, dont les branches ne poussent volontiers des racines, que lorsqu’elles sont encore tendres & herbacées. En les couchant on aura soin de faire l’onglet, autant qu’il sera possible, au-dessous du nœud qui sépare le jet de l’année précédente, d’avec le jet récent ; & si l’on est contraint d’ouvrir dans ce bourgeon, il faudra s’y prendre avec beaucoup de dextérité. D’autres arbrisseaux, dont les jeunes branches survivent rarement á l’hiver, & qui tiennent de la nature des herbes, ne peuvent même être marcottés qu’en été. La marcotte, ayant produit des racines, périra, à la vérité, jusqu’à terre, durant le froid ; mais elle demeurera vive à sa couronne, & poussera de nouveaux jets au printemps. »

» Il est encore d’autres arbres, dont les branches mûres sont si fragiles qu’elles se rompent sous la main la plus adroite, lorsqu’on veut les courber pour les coucher, soit en automne, soit au printemps : mais en été, on les trouvera liantes & dociles. Plusieurs arbres, toujours verts, dont les boutures ne se plantent avec succès que dans cette saison, sont aussi, par une suite de cette inclination, plus disposés à reprendre de marcotte dans ce même temps qu’en tout autre ; & les marcottes de certains arbrisseaux, comme le chèvrefeuil, faites même assez avant dans l’été, prennent encore assez de racines, pour qu’on puisse les sevrer en automne. »


MARE. Amas des eaux pluviales & dormantes. L’insouciance & la paresse empêchent que les hommes n’ouvrent les yeux sur leurs besoins & sur leur santé, & plus souvent encore l’habitude ne leur permet pas d’examiner s’il est possible de se passer des mares, & si leur suppression est utile. En Normandie, par exemple, chaque métairie a sa mare destinée à abreuver les bestiaux, & même souvent les hommes : elles sont peu dangereuses dans un climat aussi tempéré, aussi pluvieux, comparé à celui d’un très-grand nombre d’autres provinces du royaume ; mais s’il survient une longue sécheresse, les chaleurs y seront nécessairement vives, & très-vives : dès-lors, manque d’eau, corruption de cette eau à mesure qu’elle diminuera, corruption dans l’air, épidémie pour les hommes, épizooties pour les animaux. On a en effet remarqué que les épizooties putrides, charbonneuses, inflammatoires & gangréneuses survenoient toujours après les sécheresses. Plusieurs causes y concourent ; mais la plus puissante est la corruption de l’eau dont les animaux s’abreuvent. Ce qui a lieu quelquefois dans le nord du royaume, est très-commun dans les provinces du midi. Si les mares, au lieu d’avoir une étendue disproportionnée, avoient une profondeur capable de contenir la même quantité d’eau, le mal seroit moindre, parce que la putréfaction de l’eau commence par les bords, & gagne de proche en proche la totalité : au-lieu que si la mare, coupée quarrément ou circulairement, étoit dans toutes ses parties entourée de murs, bien corroyés avec de l’argille en dehors, ou des murs en béton, (voyez ce mot) l’eau seroit contenue sur une plus grande hauteur ; & lorsqu’elle diminueroit, ce seroit pér-