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qui, par leur germination, leur végétation & leur mort successives, sont venues à bout de changer les couches supérieures de la marne en terre végétale. Insensiblement le terrein s’est élevé & amélioré par la culture, soit naturelle, soit artificielle, & ce dépôt marneux, enfoui profondément, s’est perfectionné, & la nature semble l’avoir ainsi mis en réserve pour nos besoins, & pour récompenser notre industrie. M. M.

Les auteurs ne sont point d’accord sur l’origine de la marne. Quelques-uns prétendent qu’elle est originairement une chaux produite par le détritus ou brisement des coquilles, réduites en molécules très-fines par leur frottement & par le roulement, & déposées, ou en masse ou par couches, entre les bancs argilleux ou sablonneux. Celle qu’on rencontre sous les bancs argilleux est toujours plus profondément enterrée que l’autre. Celle des bancs sablonneux est pour l’ordinaire à deux ou trois pieds, ou plus, au-dessous de la superficie du banc supérieur, & on prétend qu’attendu la ténuité des particules de cette chaux, elles se sont insinuées à travers le sable, & ont été entraînées dans le fond du banc par les eaux pluviales, qui ont pénétré & traversé ce sable. Cette explication est plus spécieuse que démonstrative, puisque souvent sous ce même sable, & confondues avec la marne, on trouve des coquilles entières ou brisées. D’autres prétendent que la marne est dûe au simple débris des animaux, des végétaux, & des pierres calcaires ; ce qui n’explique pas mieux pourquoi on trouve des marnes en blocs plus ou moins arrondis au milieu des terres, & dont la plupart ont pour noyau un ou plusieurs morceaux de coquilles, ou bien des marnes par couches ou par plaques peu étendues, d’un à deux pouces d’épaisseur, & répandues entra des lits, soit de sable soit d’argille. Quoi qu’il en soit, que la marne aie été rassemblée par infiltration ou par dépôts, la meilleure sera toujours celle qui contiendra le plus de parties calcaires, & les plus atténuées, n’importe la couleur qui est accidentelle, & qui ne contribue en rien à la fertilité ; enfin, celle qui se réduit le plutôt en poussière, lorsqu’elle est exposée à l’air comme la chaux. Les auteurs ne sont pas d’accord, en général, sur les analyses des marnes ; cependant tous ont raison, & leurs analyses sont bien faites : mais l’on peut dire que la marne d’un canton ne ressemble en rien à celle du canton voisin, & que toutes, si on peut s’exprimer ainsi, ont un visage particulier, des combinaisons différentes, quoique le principe vraiment marneux soit le même. Ainsi la plus ou moins prompte délitescence à l’air, la solubilité dans l’eau, & l’effervescence avec les acides, caractérisent les marnes riches ou peu riches en principes calcaires, que j’ai jusqu’à présent plus particulièrement spécifiés sous la dénomination d’humus ou terre végétale, la seule qui forme la charpente des plantes toute autre terre doit être appelée terre matrice, & elle sert seulement de réservoir à l’humidité que les pluies lui ont communiquées, & de point d’appui aux plantes & à leurs racines. (Consultez le Chapitre VIII du mot Culture, où ces principes sont développés.)

La marne agit sur la terre dans laquelle on la mêle, par ses sels, par