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sous le hangard. Si elle se trouve trop sèche, on l’imbibe de nouvelle eau, car sans humidité point de fermentation, de décomposition, ni recomposition. Au mois de juin ou de juillet on recommence la même opération, ainsi qu’au mois d’octobre.

Les bons & zélés fleuristes n’emploient cette terre qu’après deux ans de travail, & ils ont raison. Telle est la manière de se procurer un fonds de terre suffisant & relatif à la nature de chaque plante en particulier ; c’est de ce mélange bien fait & bien approprié, que dépendent non-seulement la beauté des fleurs, mais encore le perfectionnement des espèces. (voyez ce mot) Ils ont encore l’attention, lorsqu’ils le peuvent, de ne pas faire servir deux fois la même terre à la même espèce de plante ; alors cette terre première est recombinée avec d’autres, & sert aux plantes d’une constitution différente.

J’ai vu des fleuristes attacher la plus grande importance à se procurer de la terre des taupinières : je conviens qu’elle est bien divisée, bien atténuée, mais en est-elle meilleure pour cela ? Si elle est argilleuse, la pluie & ensuite l’exsication la durciront tout comme auparavant ; si elle est sablonneuse, elle restera toujours sans adhésion, & cette terre ne diffère en rien de celle du champ, du chemin, &c. où l’animal a travaillé. Sa bonne qualité est donc simplement relative, & non pas essentielle. Il n’en est pas ainsi de celle que l’on retire de l’intérieur des troncs pourris des vieux arbres, parce que c’est un vrai débri de substances végétales bien consommées, & excellent pour les semis des graines fines, délicates & difficiles à germer.

Plusieurs amateurs se sont persuadés, qu’en combinant avec ces terres des principes colorans & solubles dans l’eau, ils parviendroient à colorer les plantes, par exemple, à se procurer des œillets noirs, &c. Il n’existe aucune fleur noire dans la nature, & elle ne changera pas ses loix pour leur faire plaisir ; d’ailleurs, la sève ne se charge jamais d’aucun principe colorant ; elle monte claire dans un état de vaporisation. Le fleuriste doit donc se contenter d’avoir des fleurs superbes, & rien de plus en ce genre. Une occupation bien digne de ses soins, seroit de faire des expériences sur l’hybridicité des fleurs. (Consultez le mot Hybride, & ce qui est dit au mot Abricotier.) Mais toutes ces tentatives seront en pure perte, s’il croit opérer sur des fleurs doubles ou privées des parties organiques de la génération. Il n’en sera pas ainsi des fleurs semi-doubles, parce qu’elles n’ont plus qu’un pas à faire pour devenir complettement doubles. Ses essais sur les fleurs simples, vigoureuses, belles & bien nourries, seront couronnés du succès, si leurs genres ne sont pas trop disproportionnés.

IV. Des objets nécessaires à un jardin fleuriste. Si l’amateur embrasse la fleurimanie dans sa totalité, il lui faut nécessairement une serre chaude, une serre en manière d’orangerie, des chassis vitrés, des amas de fumier de litières, du tan, des couches, des cloches, &c. Le simple amateur, plus restreint dans son goût, se contente des chassis, de quelques couches, & d’un certain nombre de cloches. Les pots, vases, caisses de toutes grandeurs, sont nécessaires à l’un & à l’autre, ainsi que beaucoup de terrines plattes pour les semis ; des