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Cependant il y a des espèces de noix dont la coquille est très-dure, contournée, profondément sillonnée en dedans & en dehors, dont on ne peut casser la coquille sans briser l’amande, & encore quelque précaution que l’on prenne, il reste des débris de l’amande dans les cavités de la coquille. L’émondage de telles noix exerce beaucoup la patience, & fait perdre beaucoup de temps. Dans certains cantons, on les appelle les noix des amoureux, parce que les filles les donnent aux garçons pour les éplucher. Les arbres qui les produisent devroient être supprimés, puisque leurs fruits sont durs & en petite quantité.

On ne doit pas différer d’envoyer au moulin les noix émondées. La coquille & la pellicule qui recouvroient auparavant l’amande, la garantissoient du contact de l’air & de la corruption ; mais dès qu’une partie de l’amande est brisée, séparée de sa pellicule, elle devient bientôt rance, d’une saveur exécrable, & elle communique promptement au reste de l’amande ses mauvaises qualités. Les noix émondées sont mises dans des sacs & portées au moulin. Il faut environ quarante livres de noyaux pour foire une bonne mouture ; le plus ou moins de poids dépend de la coutume du canton.

Le noyau est jeté sur la table du moulin ; une roue perpendiculaire, mue par l’eau ou par le vent, ou traînée par un cheval, l’écrase & le réduit en pâte ; cette pâte est mise dans une espèce de sac ; le sac placé dans l’auge du pressoir, un billot de bois par-dessus, taillé de la largeur de l’auge, & sur lequel on baisse la vis, dont l’effort de pression oblige l’huile de se séparer du marc. Cette huile est appelée huile vierge, parce qu’elle est tirée sans le secours du feu ou de l’eau chaude. La pâte retirée de dessous la presse est ensuite ou échaudée avec l’eau bouillante, ou échauffée dans une bassine avec l’addition d’un peu d’eau ; enfin, soumise de nouveau à la presse, elle fournit ce que l’on appelle l’huile cuite, dont le goût est fort. Le marc ou résidu après la pression est appelé pain de trouille ; il est excellent pour engraisser la volaille, pour la nourriture des bestiaux, & très-utile pour faire la soupe des chiens de basse cour.

Si on désire de plus grands détails sur la fabrication de cette huile, sur la manière de lui conserver long-temps sa bonne qualité, il faut consulter l’article HUILE.

L’huile que l’on retire par expression de la noix, sert aux mêmes usages que celle des olives ; elle a les mêmes principes. Il faut cependant convenir que l’huile de noix, même tirée sans feu, & qu’on appelle vierge, a un goût de fruit qui ne plaît pas au premier abord à ceux qui n’y sont pas accoutumés, mais auquel on s’accoutume plus facilement qu’à celui de fort, d’âcre, si commun aux huiles d’olives. Le noyer supplée l’olivier dans presque toutes les provinces de l’orient, de l’occident, & du centre du royaume, excepté dans celles du nord où il ne réussit pas très-bien. Cette différence mérite un examen particulier.

CHAPITRE VII.

Est-il avantageux de cultiver le noyer.

M. Duvaure s’explique ainsi dans