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mane, j’ai tiré, pendant plusieurs années de suite, des graines des fleuristes de la Flandre françoise & autrichienne, pays renommé pour les œillets : je ne dis pas qu’ils m’aient trompé ; mais certainement je n’en ai jamais obtenu un œillet passable. Cette fatalité est-elle due au changement de climat ? elle n’a du moins pas tenu au défaut de culture. Il faut en conclure que le fleuriste prudent doit lui-même choisir sa graine, la prendre sur la fleur unique qu’il aura laissée sur pied, la conserver avec loin dans un lieu ni trop sec, ni trop humide, & la semer avec les précautions indiquées ci-dessus.

Lorsque la semence a germé, lorsque la plante commence à avoir un pouce de hauteur, on peut dans les pays chauds, couvrir la superficie de la terre avec un peu de mousse fine, en observant que les feuilles d’en bas ne soient nullement recouvertes par la mousse. Cette petite précaution empêche la trop grande évaporation de l’humidité, & diminue l’action trop forte du soleil sur la terre ; enfin la plante végète plus tranquillement, & prend plus de corps.

Les pots, terrines ou caisses demandent à être exposés à un libre courant d’air. Si on les place près d’un mur, les plantes s’allongent, & se jettent du côté d’où vient le courant d’air. On fera très-bien d’exhausser les uns ou les autres au-dessus du sol, afin d’empêcher que les vers & les taupes-grillons ne pénètrent par les trous destinés à laisser couler l’eau superflue. Si les pluies sont trop abondantes, il est à craindre que la rouille ne s’établisse à la base des feuilles, & ne gagne peu à peu jusqu’au collet des racines. On couvrira donc ces pots au besoin, ou bien on les transportera sous un hangar ; le moins qu’ils y resteront sera le mieux. Si on s’est servi de pot, on peut les coucher après avoir assujetti la couche supérieure de la terre par une pression ; il faut ensuite la piocheter, pour la rendre meuble.

Le climat décide, après que la semence a été confiée à la terre, la place destinée aux pots. Dans les provinces du sud & même du centre du royaume, il convient de les soustraire au soleil de midi, & sur-tout au soleil dévorant de deux à trois heures. Dans celles du nord, ou les plus froides du royaume, à cause de leur élévation au-dessus du niveau de la mer, elles n’ont pas à redouter l’excès de chaleur : cependant il y a des jours accablans ; il est prudent alors de priver ces œillets, sur-tout du soleil de midi à trois heures.


CHAPITRE IV.

De la conduite de l’œillet de semis dès qu’il est en état d’être transplanté, & des soins qu’il demande jusqu’à sa fleuraison.


Si on a semé très-clair, ainsi qu’il a été dit, on sera moins dans le cas de transplanter de bonne heure, & on aura la facilité d’attendre une époque convenable. Dans le centre du royaume, le mois de juin, & dans le nord, celui de juillet, sont les époques ordinaires auxquelles on commence à replanter.

À cet effet, on prépare des planches de trois pieds de largeur, & bordées d’un sentier tout autour. La terre en doit être un peu moins