Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/271

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tination marquée, il faut le couper. Le gourmand, placé sur les racines & à une certaine distance du tronc, donnera par la suite un bon sujet s’il est respecté par les troupeaux, & si au moyen des épines & des ronces dont le propriétaire le fait environner, il le garantit de leurs dents meurtrières. Comme la sève monte avec vigueur dans ces espèces de gourmands, comme l’écorce a bientôt cicatrisé la plaie, & a formé un bourrelet, (consultez ce mot) il n’est pas rare d’en voir pousser de nouveaux du même endroit, & ils doivent être abattus suivant l’exigence des cas. Le grand avantage des gourmands est de servir à établir l’équilibre dans la totalité des branches, & lorsque cet équilibre est rompu, on n’a pas à volonté le pouvoir de le rétablir. Si la branche qui porte le gourmand est maigre & peu nourrie au-delà de sa place, si elle est caduque, on auroit grand tort de supprimer ce gourmand puisqu’il remplacera la branche au grand profit du propriétaire ; & d’un mal en lui-même, il en retira un grand bien. C’est un buveur d’huile, vous dit-on, il faut l’abattre. Oui, il y a des cas où il demande à l’être ; mais il est fort rare que l’émondeur habile n’en sache pas tirer parti. Il y a tant & tant de branches nues, qui demandent à être renouvelées, que sur vingt gourmands on doit en conserver quinze ou les ravaler.

La figure & la forme de l’olivier varient suivant les cantons, ou plutôt elles suivent la marotte des émondeurs ; mais n’en existe-t-il pas une que l’on devroit chercher à imiter partout ? Je veux dire celle que l’arbre affecte naturellement lorsqu’il est livré à lui-même. Si je considère un olivier sauvage, je le vois arrondi dans son pourtour, élevé en pyramide à son sommet. Je demande si cette forme, naturelle à presque tous les arbres fruitiers, n’est pas la meilleure ? Elle présente plus de superficie que toute autre, & par conséquent plus de rameaux à fruit. La facile cueillette des olives a sans doute déterminé à écraser le sommet, à ne pas excéder en hauteur les côtés ; enfin, à donner la forme horizontale. Une tête d’olivier ainsi tenue, bien arrondie dans la circonférence, plaît à la vue, offre une forme agréable. C’est beaucoup, j’en conviens, mais je demanderai encore est-ce le mieux possible ? Je ne le pense pas.

La crainte des troupeaux oblige presque par-tout de tenir à une hauteur hors de leur portée, les rameaux inférieurs, d’où il résulte que la surface du dessous de l’arbre devient parallèle & horizontale comme la supérieure ; alors il ne se trouve plus qu’un très-petit diamètre de rameaux circulaires dans leur pourtour, & tronqués & horizontaux en dessus comme en dessous. Il résulte de cette taille forcée, que l’arbre est dans une gêne & dans une contrainte perpétuelles, & qu’on ne peut pas donner à ses rameaux le diamètre qui leur convient. L’expérience journalière prouve cependant que les rameaux que l’arbre se plaît à laisser pendre, sont ceux qui se chargent le plus de fruits ; c’est donc une perte réelle pour le propriétaire, outre celle des bons bourgeons ou rejets qui s’élancent des racines, & servent dans la suite à renouveler les olivettes. On peut dire avec certitude que les troupeaux & le froid sont & seront de plus en plus la cause de la destruction totale