Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/322

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On glisse ces planches les unes après les autres dans la forte rainure ménagée dans la pièce de bois qui les fixe par le bas, & dans celle du haut qui supporte le toit, de la même manière qu’on ferme le devant d’une boutique par des planches qui glissent dans les coulisses. Dans le milieu sont deux montans qui se placent dans les mêmes coulisses, & qui sont assujettis par en haut & par en bas avec des chevilles de fer que l’on pose & que l’on enlève à volonté. Ces deux montans servent de support à la porte que l’on tient ouverte ou fermée suivant le besoin ; mais dans les provinces du midi, elle ne reste guères close plus de quinze jours à trois semaines pendant tout l’hiver. Si la crise passagère du froid devient très-rigoureuse, on recouvre ces planches avec de la paille ou avec des paillassons. Avant l’hiver on a eu soin de garnir toute la surface de la terre d’une bonne couche de fumier. Dans beaucoup d’endroits on se contente de couvrir les orangers avec de simples paillassons. Le coup d’œil agréable qu’offrent ces arbres, la récolte très-lucrative de leurs fleurs & de leurs fruits encore verts & petits, tout invite à multiplier leurs espaliers, puisqu’ils exigent si peu de soins & si peu de dépenses : mais dans les provinces du nord de semblables espaliers sont de purs objets de luxe qui rapportent très-peu, & qui ne conviennent qu’à des financiers ou à de très-grands seigneurs qui préfèrent la difficulté vaincue à un espalier d’arbres fruitiers ordinaires, bien plus productifs & plus analogues au climat.

La conduite des orangers est la même que celle des autres arbres pour la taille, l’ébourgeonnement, &c. ; mais ces arbres exigent une terre bonne, souvent renouvelée, & sur-tout bien fumée. Avant de les planter, on doit s’assurer de la profondeur de la couche végétale, reconnoître si elle est au moins de quatre pieds de diamètre, & sur-tout si elle ne repose pas sur une couche d’argile : cette dernière retient l’eau, & l’aquosité fait pourrir les racines. Il en est ainsi des fonds marécageux ou constamment trop humides.

Avant l’hiver, ainsi qu’il a déjà été dit, on couvre le sol d’une couche de fumier d’un à deux pouces d’épaisseur. Après l’hiver, c’est-à-dire au commencement de mars, ce fumier est enfoui par un fort binage, & lorsque la séve commence à être en mouvement, on donne une ample mouillure avec la lessive dont on a parlé. La multiplicité des racines de l’oranger, & sur-tout de ses chevelus, effrite beaucoup la terre, détruit le gluten qui donnoit du corps à ses molécules, enfin absorbe l’humus ou terre végétale, seule partie qui constitue la charpente des plantes. Il est donc essentiel de réparer ces pertes par la suppression de la terre usée & par l’addition d’une terre remplie des matériaux de la séve. Le même travail des orangers en caisse doit avoir lieu pour les espaliers, c’est-à-dire que tous les deux ou trois ans, on enlève, après l’hiver, la couche supérieure, & qu’on ouvre une tranchée à une certaine distance du pied de l’arbre, en ménageant soigneusement les racines que l’on trouve : on remplit, & on recouvre le tout avec de la terre préparée. Le plus grand défaut de tels espaliers bien conduits est de pousser une trop