Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/599

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moins un de plusieurs vienne à bien pour satisfaire à vostre intention. Estans sortis de terre, ces arbrisseauxc-ci, à la manière de ceux à pepins, seront gouvernés au serfouer, au sarcler, à l’arrouser, & sur-tout à l’esmunder, pour s’en abstenir entièrement durant le temps défendu, car les arbres à noyaux craignent plus la tranche de la bêche que nuls autres.

» En général, ni les pepins, ni les noyaux ne rapportent immédiatement arbres du tout francs pour produire fruit du tout semblable à leur origine ; ce qu’est besoin de prévoir pour en venir au remède. Les seuls pepins de meûriers & de cormiers, à la longue, fructifient sans changemens. De mesmes, les noyaux de menus abricots, des alberges & des pêches, si on les met en aussi bonne terre pour le moins que celles dont on les aura tirées, & qu’ils soient profitablement cultivés. Ainsi respondent ceux des Cornonailles, en quel terroir qu’on les loge pour leur robuste force. Des noyaux des gros abricots, des prunes, des cerises ni des olives, n’espérez, par le seul semer, que fruit sauvage, de quelque manière que le gouverniez. Touchant les noyers, amandiers & pins, par les fruits seulement semés, ils viennent grands & francs arbres, pourvu qu’ils soient en terroir leur agréant & à propos cultivé. Par la semence des chastaignes en aurez-vous des bons arbres ; mais sans comparaison meilleurs se rendront-ils par enter, que les laissant en leur naturel, comme sera veu. »

Ceste-là est la voie la plus usitée à tirer arbres de noyaux & de fruits, mais non la meilluere ; car un plus affeuré moyen y a-t-il pour y parvenir, dont l’invention est d’autant plus louable que moins se perdent de noyaux & de fruits dans terre, sans hasard, venant à bien, tout ce que l’on emploie en c’est endroit. »

» À l’entrée de l’hiver, la lune estant vieille,[1] mesterez dles noyaux & des fruits dont est question, parmi de la terre déliée que mettrez ensemble par litées dans de larges paniers, & iceux reposerez pour tout l’hiver dans des caves, les humectans avec un peu d’eau tiède que par fois jetterez dessus. Au commemnent du printemps trouverez les noyaux & fruits avoir germé dans la terre quatre doigts ou demi pied de long. Lors ostés de là les ferez loger en la pépinière ; les y arrangeant comme quand l’on plante des pourreaux. C’est assavoir par rayons ouverts, mettant le noyau ou fruit au fond du rayon, & laisant ressortir à l’air un peu de son germe pour là, s’achever d’accroistre comme ils feront moyennant bonne culture, & requis arrousemens. Ainsi, sans avoir senti aucune importunité des temps, s’avanceront gaiement, & si bien, que dans peu d’années le rendront beaux arbres. » v

» Quinze ou seize mois les arbrisseaux séjourneront en la pépinière, non davantage ; au bout duquel temps doucement arrachés de là, seront transplantés en la bastardière, pour s’y achever de tonifier. Ce changement leur est salutaire, ne pouvant en la pépinière, ces jeunes plantes se parfaire ainsi qu’il appar-

  1. Voyez note 2.