Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/601

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’on pourra, afin que leurs racines en sortent entières, si possible est ; & après en avoir retranché tout ce qui y sera treuvé d’offensé & rompu par mesgarde, & soigné la pointe des plus longues racines, bien que saines, les arbrisseaux seront incontinent mis en terre sans nullement séjourner, de peur de l’esvent. Ce sera dans des rayons ou petits fossés, tirés à la ligne droite, larges de deux pieds, profonds seulement d’un, qu’on les plantera ; au fond desquels premièrement jettera-t-on demi-pied de la meilleure terre du lieu, prinse en la superficie, pour sur icelle asseoir les racines des arbres, & les en recouvrir aussi… Ces racines seront escartées, sans s’entre-toucher ni s’entre-croiser l’une l’autre, afin que tant mieux elles prennent terre, que mieux se trouveront à leur aile. Après le reste du rayob sera rempli & réuni au plan de la bastardière, par-dessus lequel ne ressortiront les arbres qu’environ deux doigts. Là, estant justement coupés tout doucement sans les esbranler, de peur de les déstourner ; ce que prevenant, faudra avec la serpe bien tranchante, couper l’arbre, poussant en bas, non en tirant en haut. Le poinct de la lune n’est observable en cest droit, estant bon de planter ces arbres-ci, & en son croissant & en son décours, en l’un & en l’autre terme, se pratiquant heureusement pourveu que la terre & le ciel soient bien disposés. Quant à la saison, celle d’après l’hiver est à préférer à toute autre pour le profit des arbres. Car craignant estrangement les froidures, en leur tendre jeunesse, servira de beaucoup à leur avancement de ne les exposer lors à la mrci du mauvais temps & par ce moyen engarder que les gelées & glaces n’ayent entrée dans la moelle des arbres par la tranche qu’on est contraint de leur faire, les roignant quand on les plante. Il est vrai qu’en pays chaud & sec, on les pourra planter en l’automne, leurs feuilles estant cheutés, mais à telle condition que de les couper quelques doigts plus haut que si on les plantoit au printemps pour empêcher l’entrée aux froidures, en intention de les retailler plus bas, le beau temps estant revenu. Les arbrisseaux seront posés équi-distemment d’un pied & demi, par rengées allignées de trois pieds de distance l’une de l’autre, trop grande n’estant elle, pour là à l’aise se pouvoir manier lorsque l’on ente, & lorsque l’on cultive les arbres ; & pour ceste considération aussi que mieux, & plustost s’accroîtront-ils largement qu’estroitement disposés ; voire & avec autant d’avancement que plus de bois feront les arbres, estant ainsi à leur aise, dans trois ans, qu’ils ne seroient de six, logés à l’estroit. La presse leur déstournant toujours l’accroist, & quelquefois leur causant la mort. »

» À ces arbres seuls ne servira la bastardière, ainsi à y enraciner des branches à ce propos, pour en faire des arbres, comme de celles de figuiers, grenadiers, coïgners, coudriers, qu’en tels arbres on coupera és cimes & bouts des branches les plus droites & polies, de la longueur de deux pieds, plus ou moins ; puis on les plantera dans les fossés creusés à la manière susdite, & ce sera en recourbant les branches au fond du fossé pour en ressortir sur le plan de la terre, quelques deux doigts