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en peu de jours. Cette maladie, plus commune aux jeunes arbres qu’aux vieux, est produite par deux causes très-opposées. La première tient à une transpiration arrêtée subitement, qui cause une espèce d’apoplexie à l’arbre. Si on déchausse son pied, on trouve les racines flétries, mais entières. J’ai vu deux fois cet exemple lorsqu’il règne des vents froids & violens. Peut-être ce que j’appelle ici transpiration arrêtée, n’est-il qu’une évaporation trop rapide de cette transpiration, qui augmente l’intensité du froid. Quoi qu’il en soit, à peine a-t-on eu le temps de s’apercevoir que l’arbre est malade, que la mort survient aussitôt.

La larve ou ver du hanneton, nommé ver-blanc ou turc, & celle du rhinocéros ou moine, s’attache à une mère racine, l’arbre souffre ; mais si plusieurs larves se réunissent au même endroit, ce qui arrive souvent, il se fait une extravasion considérable de séve, & l’arbre périt. Dans ces deux cas, j’ai éprouvé une seule fois, pour le premier, qu’ayant fait creuser & enlever une grande partie de la terre qui environnoit les racines, & après avoir fait jeter plusieurs seaux d’eau dans la fosse, l’arbre se remit aussi-tôt. La même ouverture sert à découvrir s’il y a des insectes rongeurs autour des racines, & de l’eau dans laquelle on a fait éteindre de la chaux, versée dans le creux, en écarte ces insectes. La chaux est-elle nécessaire ? Je ne puis l’affirmer, puisque de l’eau simple, & en quantité, m’a procuré le même succès.

Plusieurs écrivains parlent d’une espèce de maladie épidémique qui fait périr tous les arbres d’une plantation, les uns après les autres. Je n’ai jamais été dans le cas d’examiner ce fait ; mais je ne vois pas qu’on en ait désigné la véritable cause. Je vais hasarder quelques conjectures.

Admettons que la couche de terre dans laquelle on a planté les mûriers, soit de qualité requise, mais a-t-on examiné si la couche inférieure n’est pas argileuse ou crétacée, ou un tuf pur. Dans ces derniers cas, les racines parvenues à ces secondes couches, ne trouvent plus à plonger ; elles s’étendent horizontalement entre deux, & pour peu que la saison soit pluvieuse, elles nagent, pour ainsi dire, dans une nappe d’eau. Si les choses se passent ainsi, il n’est pas surprenant que la pourriture gagne les racines, que tous les arbres du champ périssent les uns après les autres. Il n’est guères probable que la pourriture se propage par la racine d’un arbre à la racine d’un autre arbre, qu’il s’exécute une espèce d’inoculation par attachement, car jetez dans une fosse nouvelle, où vous voulez planter un mûrier, des racines d’autres mûriers, celles-ci pourriront, tandis que l’arbre ne cessera de prospérer.

D’après l’acharnement qu’on a d’écourter & de mutiler les racines de l’arbre que l’on plante, il est certain que de la première, de la seconde, & même de la troisième année, les nouvelles racines ne remplissent pas toute l’étendue de la fosse, & n’ont pas encore pénétré dans la terre voisine. Ne se peut-il pas que dans une longue sécheresse le sol se trouve si sec, qu’il n’y reste plus l’humidité nécessaire à l’ascension de la séve ; & si la séve s’est soutenue jusqu’à cette époque, elle a dû son ascension à l’humidité que les feuilles attirent