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assez éloignée du pied de l’arbre. Il est donc naturel de penser que la graine du mugho ou crin ne lève que dans les marais comme dans le seul terrain qui lui soit propre.

Dans les vallées & au bas de la côte, on traverse une grande forêt du pinus silvestris. Les graines tombent dans une vallée voisine qui est celle du Rhône, & quelquefois même dans la grave de ce fleuve & dans des parties marécageuses qui ne sont pas à la vérité de la tourbe ; les graine qui lèvent ne donnent pas le pin mugho.

Près du village de la Bravine, dans les montagnes de Neufchâtel, les marais tourbeux en sont couverts. On le trouve encore dans le canton de Fribourg sur la droite de la route de Vevay à Bulle, & toujours dans les marais.

Il paroît que M. de Haller, soit dans la première, soit dans la seconde édition des plantes de la Suisse, n’a parlé de cet arbre que sur le rapport des autres & qu’il n’en a pas jugé par lui-même.

2. Des pins maritimes. Cette dénomination tient-elle à ce qu’ils croissent spontanément près de la mer ? Leur existence, tient-elle à respirer son air salé ? Pourquoi n’en trouve-t-on pas dans l’intérieur des terres ? je pense que la solution de ce problème peut être donnée en deux mots, c’est qu’on n’a pas porté sa graine dans l’intérieur des terres. Je doute qu’en Suisse, le vrai pays des pins, on en trouve d’autres que ceux qui sont dans les jardins des curieux. Celui qui y domine, est le pinus silvestris des anciens, ou pin de Genève, ou pin de Tarare, & que dans le pays on appelle baille. Des landes de Bordeaux on a porté la graine du pin maritime dans le périgord noir, où il est mêlé avec le pinus silvestris & la culture de cet arbre apporte quelques profits aux malheureux habitans de ces cantons incultes, & qui pourroient tous être couverts de ces arbres, si les facultés des propriétaire leur permettoient de mettre ces friches en valeur. Le pin maritime a déjá fait quelques pas dans l’intérieur de la Hollande, dans les provinces de Gueldes & d’Overissel. Dans les landes entre Anvers & le Mordich, le maritime & le silvestre sont cultivés à main d’homme ; ce dernier pin y réussit tout aussi-bien que le premier, & sa graine se vend plus cher dans le pays & y est plus recherchée que celle du maritime ; on l’a multiplié dans le Maine, au point que la graine y coûte moins cher qu’à Bordeaux : voilà encore un rapprochement qui prouve que c’est la faute de l’homme si ces arbres ne sont pas plus multipliés, & que la prospérité d’un arbre ne tient pas uniquement au lieu qui l’a vu naître. On en a encore un exemple dans le mélèse. (Consultez ce mot)

Le pin maritime ne se plaît pas, végète foiblement & périt de misère, s’il est semé dans les terres calcaires. Il aime les terres mouvantes, les sables secs & légers, tels que ceux des landes de Bordeaux, d’Anvers, de la Gueldre, le sol schisteux, la forest de l’Esterelle, dans les bois de St. Tropez en Provence, sur les dunes formées par la mer : le pin silvestre, au contraire, ne réussit très-bien que dans les terrains calcaires, tout comme le pin maritime n’acquerra jamais, du moins je le pense, une très-grande élévation dès qu’il se