Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/775

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

terre franche de jardin ; on employe avec le même succès la terre forte, mêlée de gravier.

On observera que la terre ne renferme aucun mélange de racines & de fumier, parce que les racines, quoiqu’elles contribuent à lier les terres, laissent néanmoins, en pourrissant, des vides & des sinuosités par où l’air s’introduit & exerce son action intérieurement au préjudice du mur; elles empêchent en outre la compression de la terre, en la soulevant, elles en barbelent la surface, qui par là, n’est plus propre à recevoir l’enduit de mortier; les effets du fumier ne sont pas moins nuisibles par les raisons que nous venons d’expofer. Il faut que la terre qu’on met en usage, ait à peu près le degré d’humidité qu’elle a ordinairement à un pied de profondeur; cette humidité, par son évaporation infenfible, fert à expulser l’air intérieur, & comme par son poids comprime les parties dont l'affaissement total donne à la masse une condenfation qui en fait toute la solidité. Si la terre est trop mouillée, le volume d’eau qu’elle renferme la rendant mouvante, forme un obstacle à la compression de ses parties, & par son écoulement laisse des ouvertures & des fentes dans lesquelles la chaleur & l’eau venant à pénétrer, concourent à la ruine d’un ouvrage encore mal affermi. La terre sèche n’est point propre à la construction des murs en pisé, parce que étant poreuse & remplie d’air, au lieu de prendre la consistance nécessaire, elle se dilate & se réduit en poussière.


De ta préparation de la terre à piser.

Avant de prendre de la terre d’aucun champ, on aura la précaution de lever le gazon & toute sa superficie à un pied de profondeur, & même jusqu’à ce qu’il ne se rencontre plus de racines. Si le champ a été beaucoup fumé, il faut y fouiller jusqu’à ce que l’on soit assuré qu’il ne s’y trouve plus de fumier mêlé avec la terre.

Si l’on veut ménager au piseur une terre préparée de la manière que son art l’exige, on aura soin i°. d’entretenir son humidité naturelle, humidité si précieuse, qu’il est essentiel de couvrir la fosse pour en empêcher l’évaporation. 2°. De diviser la terre, autant qu’il est possible, avec la pioche, la pelle & le râteau, afin que l’ouvrier ne trouve point de mottes sous son pisois. Si la terre manque d’humidité, on peut la lui communiquer avec un arrosoir à grille & la bien mêler. Si elle s’attache au pisois, elle est trop chargée d’eau.; on doit en ce cas la mêler avec suffisante quantité de semblable terre plus sèche.

Si quelque grande pluie a mouillé toute la terre qu’on se proposoit d’employer, il vaut mieux suspendre l’ouvrage que de le continuer avec de la terre trop molle. On pourroit construire la fosse, de manière qu’il y eût toujours quelque endroit sec lorsque les autres seroient trop mouillés.

Il est des terres à piser de la plus excellente qualité, qui néanmoins sont fort graveleuses ; il suffit d’en ôter des plus gros cailloux : l’abondance les gravier ajoute à l’excellence d’une