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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/28

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J’ai observé ces mouvemens naturels & accidentels dans la sensitive commune, dans un degré inférieur, & sur plusieurs autres plantes qu’on appelle dormeuses. J’avois pris une branche de tamarin, elle fermoit ses feuilles lorsque je la secouois, & elles étoient aussi fermées que celles de la sensitive lorsqu’on la touche. Un abrus n’éprouva aucun changement dans ces mêmes circonstances. Les plantes qui subissent ces changemens de la part de la lumière, les éprouvent aussi, quoique moins généralement, de sa part du mouvement, & toutes celles qui sont susceptibles de ce dernier, changent lorsque la lumière vient à leur manquer. La lumière donne à leurs feuilles cette position que le tact leur fait perdre, & son absence produit le même effet que le toucher, quoique d’une manière plus foible.

La sensitive a les feuilles droites & épanouies à midi ; les pédicules forment un angle aigu avec la principale tige, & les deux feuilles qui naissent de chaque côté des premières ou des plus basses, sont écartées l’une de l’autre. Les lobes qui composent celles-ci, sont au nombre de douze paires, dont la position est pareillement horizontale : telle est la position de la jeune plante à midi : vers le soir les feuilles commencent à se redresser comme dans la parkinsonia, & leurs côtés se rapprochent ; la nuit venue, les feuilles se ferment par le haut, de même que celles de l’abrus par le bas ; les deux côtés se joignent, & le pédicule qui les soutient se fane. Tel est l’état de repos dans lequel la sensitive se trouve naturellement tous les soirs & on peut le lui procurer à midi, de même qu’à l’abrus, en les plaçant dans un endroit obscur.

Il y a à la base du pédicule qui tient à la tige principale, un faisceau de fibres qui naissent de la partie médullaire, & qui percent les parois ligneuses de la tige. Les fibres montent de là en ligne droite, jusqu’à l’extrémité du pédicule, d’où naissent deux feuilles, & où se trouve un autre faisceau pareil au premier. Ces dernières fibres rampent le long de la côte principale, & forment de chaque côté d’autres faisceaux à la base de chaque lobe… D’autres fibres plus déliées aboutissent à la feuille, & poussent des jets de côté & d’autre.

Pendant la nuit le tact ne fait aucune impression sur la sensitive, parce que ses feuilles sont déjà fermées, comme si on les avoit touchées ; elles se redressent & s’épanouissent pendant le jour, & c’est alors qu’on s’aperçoit de l’effet dont il est question. La lumière développe les feuilles, sépare les côtes & redresse les pédicules, en y excitant un mouvement de vibration. On a vu que cet effet est produit dans l’abrus, par les faisceaux de fibres placés à la base des pédicules. Comme ces faisceaux sont au nombre de trois dans la sensitive, le même principe doit produire de plus grands effets que dans l’abrus où il n’y en a qu’un.

Une preuve que le mouvement de la sensitive est occasionné par la lumière, c’est que ses feuilles ne changent de position que lorsqu’elles sont entièrement ouvertes. Les jeunes, lors même qu’elles ont six lignes de long, n’éprouvent aucun mouvement, quelque fort qu’on les touche. Pour que ce mouvement se perpétue dans