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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/310

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& très-zélé pour le bien public, a avancé dans ses écrits, que les lichens & les mousses étoient avantageux aux arbres, en ce qu’ils les garantissoient du froid, & entretenoient une humidité sur leur tronc. J’ai déja démontré, en plusieurs endroits de ce Cours d’Agriculture, que ces corps parasites s’opposoient à la libre transpiration du tronc & des branches ; que la transpiration arrêtée dans l’arbre & dans les plantes opéroit les mêmes ravages que dans l’homme, enfin que ces corps étrangers rendoient les effets du froid plus funestes. Pour mieux juger du petit par le grand, il suffit de considérer les arbres dont les branches sont chargées de la plante parasite nommée guy ; (consultez ce mot) on les voit chaque année dépérir, & être plus attaqués par le froid que les arbres voisins & de même espèce qui en sont dépourvus. Il faut aimer les paradoxes pour oser sérieusement avancer une telle assertion. La négligence habituelle du commun des cultivateurs n’a pas besoin de prétexte ; il en trouve mille pour autoriser son insouciance. Quant à moi, je ne cesserai de dire, & de répéter, nettoyez vos arbres de tous les corps parasites, parce qu’ils vivent à leurs dépens ; ces corps étrangers rendent les places qu’ils occupent sur l’arbre plus exposées à la rigueur des saisons, & souvent y causent des chancres.

III. Culture, Elle n’a rien de particulier. On destine le pommier ou à être planté sur la lisière des chemins ou des champs, ou bien on sacrifie des champs entiers à leur plantation.

Les arbres de lisière ou de ceinture ont un grand avantage sur les autres, parce qu’ils sont environnés d’un grand courant d’air, & reçoivent la lumière du soleil de tous les côtés ; enfin ils profitent de l’avantage produit par les labours donnés aux champs : voilà leur beau côté.

Si lorsqu’on a levé le semis, pour en transporter les plants dans la pépinière, on avoit conservé leur pivot ; si en plantant les arbres à demeure on ne l’avoit pas coupé ; enfin, si la fosse avoit été creusée assez profondément pour le recevoir dans son entier, cet arbre ne pousseroit pas des racines horizontales & presqu’à fleur de terre, qui sont mâchées & mutilées par la charrue. Il se forme, il est vrai, un bourrelet tout autour de la blessure ; mais de ce même bourrelet il en sort une infinité de racines capillaires qui dévorent les moissons, jusqu’à ce qu’elles soient emportées par de nouveaux coups de charme. Il est démontré que la greffe diminue la longévité & la force de l’arbre ; mais l’une & l’autre sont bien plus diminuées lorsqu’on coupe le pivot.

En outre, comme la loi prescrit de ne planter qu’à une certaine distance du champ de son voisin ou du chemin riverain, toute la partie du champ qui avoisine l’arbre est mal labourée, la charrue tourne difficilement pour commencer un nouveau sillon, & j’ai presque toujours vu ces malheureux arbres criblés de blessures entre deux terres, faites par le soc de la charrue, & souvent l’écorce du collet des racines presqu’entièrement détachée du tronc. Ne vaudroit-il pas beaucoup mieux laisser un certain espace