Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/340

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chap. 5.) desquelles aucunes superstitieuses femmes tiennent encore aujourd’hui quelques reliques : à quoi nullement ne faut arrêter pour la ridicule curiosité, ains à ce qui peut avancer l’œuvre par raisonnable jugement ».

Certainement en 1590, époque à laquelle Olivier de Serres composoit son Théâtre d’Agriculture, on n’avoit aucune notion distincte des effets de l’électricité ; aussi ce grand homme ne pouvoit concevoir l’analogie qu’il y avoit entre ce phénomène & l’incubation ; & il n’auroit pas tort s’il avoit prononcé d’après l’expérience & non d’après le raisonnement. Je demande à ceux qui nient les effets de l’action électrique sur les œufs que la poule couve, s’ils décident par le témoignage des autres, ou par conviction intime appuyée sur des faits ? On se hâte de juger & de regarder comme des contes de bonnes-femmes, ce qui paroît extraordinaire. Avant de me décider pour ou contre, j’ai voulu vérifier le fait. Dans la même chambre où j’avois fait placer les nids & les couveuses, j’attachai, sous plusieurs, de petites chaînes de fer qui communiquoient avec le plancher. Plusieurs nids, & en nombre presqu’égal, restèrent isolés suivant la coutume la plus générale ; enfin je rendis, autant qu’il dépendoit de moi, toutes les circonstances égales. On sait que l’année où parurent les brouillards secs, non-seulement les couvées des poules mais encore celles des canards, des pigeons, &c. avortèrent en grande partie, & que les tonnerres & les orages furent très-fréquents. C’est précisément ce phénomène qui m’engagea l’année d’après, à examiner si l’électricité produisoit les effets qu’on lui attribuoit. En conséquences je disposai l’appareil dont je viens de parler. Il y eut également cette année-là plusieurs orages précédés & suivis de tonnerres, par conséquent beaucoup d’électricité dans l’atmosphère, mais pas autant qu’en 1783… Dans plusieurs nids isolés beaucoup d’œufs restèrent sans éclore, & les petits déjà bien conformés y furent trouvés morts, tandis que dans tous les nids qui communiquoient par la chaîne au réservoir général, toutes les couvées vinrent à bien. Si l’électricité atmosphérique influe sur le lait & le fait tourner ; (consultez l’article Beurre) si les pourvoyeurs de marée ont reconnu qu’une verge de fer qui traverse le panier, & qui communique à la terre par une chaîne, conserve leurs poissons & les empêchent de pourrir, pourquoi se refusera-t-on à croire que la trop forte électricité nuit aux poussins dans l’œuf, tandis qu’une simple commotion, qu’une simple étincelle qu’on tire d’eux par le moyen de nos machines électriques, les frappe de mort. Il est bien démontré que dans l’œuf (consultez ce mot) le poussin respire, tandis que dans le ventre de sa mère l’enfant ne respire pas, & que ses poumons ne se développent que lorsque le contact de l’air extérieur les a mis en action. C’est donc à travers les pores visibles & nombreux de la coquille qui renferme le poussin, qu’il pompe un air très-fin ; mais si l’électricité s’y joint, rien ne répugne à admettre la possibilité de ses mauvais effets sur cette frêle machine souvent à peine bien conformée. Quoi qu’il en soit, quand même l’addition de la ferraille