Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/429

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duit est à moitié entre le propriétaire & le maître-valet, celui-ci est chargé de faire les avances de tout le travail, & il vous dit froidement, pourquoi voulez-vous que je paye pour mon maître. Dans tous les cas possibles, il n’est pour voir que l’œil du maître qui ne s’en rapportera à personne, jusqu’à ce qu’il ait fait à ses frais, & vu finir l’ouvrage.

Si on a fait sarcler rigoureusement après la première & la seconde année de la formation de la prairie, ainsi qu’il a été dit dans la première section du chapitre IV ; si, chaque année à mesure qu’on a vu les plantes parasites commencer à se multiplier on les a détruites, il est clair que l’on rendra les prairies perpétuelles & qu’elles seront en bon état pendant des siècles entiers. Si le mal est déjà un peu considérable, la cause connue, les moyens de les réparer seront mis en usage. Par exemple, aussitôt après la coupe du premier foin, des femmes armées de râteaux à dents de fer, les passeront & repasseront sur l’herbe, afin de déraciner la mousse & l’enlever hors du champ. Il est bon d’observer que la mousse qui paroît la plus desséchée à l’œil, reprendra la première couleur & sa première végétation si elle reste sur le champ, & si la pluie l’enterre convenablement. Aux râteaux succédera la herse, dont la partie postérieure sera garnie de branches sèches & épineuses… Tout ce qui ne sera pas plante graminée & bonne plante graminée, sera enlevé de terre avant l’hiver, & les racines soigneusement détruites. Les places dépouillées d’herbes, ou couvertes par des plantes parasites quelconques, seront défoncées à la profondeur de deux fers de bêche, & semées de nouveau à la fin de l’hiver, ainsi qu’il a été dit… Les rats, les mulots, les taupes, sont les grands destructeurs des prairies : noyer les premiers, ou les éloigner au moyen de l’eau, multiplier les pièges immanquables pour les autres, sont des procédés nécessaires ; enfin régaler sur le voisinage le terrain des taupinières, & y jeter de nouvelle graine. Si les petits soins ne peuvent remédier au délabrement de la prairie, il faut la détruire.

Je ne connois pas de moyen plus sûr que celui de la bêche, (consultez ce mot) qui ramène mieux à la superficie la terre de dessous, & enfouisse mieux les touffes d’herbe, leurs racines, &c. ; on diroit, après que le champ est ainsi bêché, que depuis long-temps il est mis en culture réglée, & il est tout-à-coup prêt à recevoir telle espèce de semence en grains qu’on voudra lui confier. Celle du chanvre sera prodigieuse, pour peu que la saison la favorise, & celle des grains versera si on n’a pas l’attention de semer très clair, afin que les tiges prennent une consistance capable de soutenir la pesanteur des épis. Ce genre de travail ne peut être mis en pratique que dans les pays où le cultivateur est accoutumé à se servir de cet instrument. L’homme le plus exercé à manier la houe, la pioche, ne divisera & n’aplanira jamais aussi bien la superficie du sol, & n’enterrera jamais aussi exactement les touffes d’herbes qu’avec la bêche. L’époque de ce défrichement dépend de celle des semailles des blés, sous quelque climat que l’on habite. Il convient de calculer le nombre des jours nécessaires, & en ajouter quelques-uns en lus, afin de